Non, le SMIC ne va pas être être abaissé à 1050 euros brut en 2026

Des comptes imitant des médias traditionnels propagent régulièrement des infox en rapport avec l'actualité, afin de générer de l'engagement et donc des revenus. En pleine préparation du budget pour 2026, des publications virales sur le réseau TikTok prétendent ainsi que le salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic), actuellement d'environ 1800 euros brut, sera abaissé à 1050 euros brut en janvier 2026. Mais c'est faux : aucune mesure similaire ne figure au budget, et il est même impossible d'en abaisser le montant dans l'état actuel du droit.

"Le smic français baisse de près de 40% passant de 1800€ brut à 1050€", affirme une voix off dans un montage vidéo partagé sur TikTok totalisant près de deux mille partages. Le compte qui publie la vidéo, suivi par près de 60.000 personnes, se présente comme un "média indépendant" et porte un titre générique, "france__actu".

La vidéo poursuit : "La [...] baisse a été votée à l'Assemblée Nationale ce matin avec une majorité relative, pour faire baisser le salaire moyen des français dès 2026", une baisse "stupide" justifiée par la nécessité de "réduire la dette publique française, et, surtout, améliorer la situation économique du pays".

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Capture d'écran réalisée sur TikTok, le 22/10/2025. Croix rouge ajoutée par l'AFP.

L'affirmation est reprise et relayée dans d'autres vidéos courtes sur TikTok (1, 2, 3), totalisant des milliers d'interactions.

Suivant le format bien rodé de ces comptes de fausses actualités actifs sur TikTok, la voix qui narre le message de la publication est générée par intelligence artificielle, comme permet de l'établir avec quasi-certitude le logiciel Hiya de reconnaissance de clonage vocal, accessible via l'outil de vérification InVid-WeVerify.

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Capture d'écran réalisée sur l'outil InVid-WeVerify, le 24/10/2025.

Contrairement à ce qu'avancent ces publications virales, il n'est pas question de baisser le montant du Smic pour réaliser des économies : cette mesure n'a pas été proposée, et encore moins votée à l'Assemblée nationale. De plus, il n'est légalement pas possible de baisser le montant du salaire minimum

Aucune baisse du salaire minimum n'est prévue

Premier constat : aucune loi visant à "faire baisser le salaire moyen des français" n'a été adoptée à l'Assemblée, et aucune proposition de cet ordre ne figure dans le projet de loi de finances de 2026, examiné depuis le 24 octobre à l'Assemblée nationale (lien archivé ici). Le Smic, le salaire minimum légal, n'a par ailleurs aucun rapport avec le salaire moyen, qui représente la somme de tous les salaires dans une population donnée divisée par le nombre de travailleurs.

Contacté par l'AFP le 20 octobre, le ministère du Travail et des Solidarités a démenti l'affirmation. "Cette fausse information n'a absolument aucun fondement", a répondu son service de communication. "Le montant du Smic ne sera pas baissé", a-t-il ajouté, "au contraire, les mécanismes de fixation du Smic prévues par la loi  (articles L.3231-1 à L3231-12 du code du travail) prévoient des revalorisations, notamment en fin d'année pour un relèvement effectif au 1er janvier" (lien archivé ici). 

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Capture d'écran réalisée sur le site Dalloz.fr, le 22/10/2025.

Le salaire minimum a été fixé à 1 801,80 euros mensuels au 1er novembre 2024, soit 11,88 euros brut de l'heure, en avance par rapport à l'échéance du 1er janvier 2025. 

Un montant indexé sur l'inflation

Le salaire minimum interprofessionnel de croissance, qui a succédé en 1970 au Salaire minimum garanti (Smig), est effectivement revalorisé chaque année en vertu de l'article L3231-4 du Code du Travail, qui prévoit que "la garantie du pouvoir d'achat des salariés [...] est assurée par l'indexation du salaire minimum de croissance sur l'évolution de l'indice national des prix à la consommation institué comme référence par voie réglementaire" (lien archivé ici).

Concrètement, le montant du Smic est réévalué chaque année par un groupe d'experts en tenant compte de l'inflation, mesurée sur la consommation des 20% des ménages ayant les revenus les plus faibles (lien archivé ici). Il a ainsi connu une revalorisation de 5,4% environ entre 2023 et 2024 avec plusieurs augmentations : au 1er janvier 2023 et 2024 sur le fondement de la revalorisation annuelle, ainsi qu'une augmentation automatique liée à l'inflation en mai 2023. 

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Capture d'écran réalisée sur le site Bpifrance, le 23/10/2025.

Cela sera donc également le cas cette année. "En décembre 2025, sur le fondement des dernières données disponibles de l’INSEE sur l’évolution des prix [...] et du rapport du Groupe d’experts SMIC, le nouveau montant du SMIC sera déterminé pour une revalorisation à partir du 1er janvier", a indiqué le ministère du Travail.

A noter que le gouvernement peut également décider à tout moment une augmentation du salaire minimum, bien que le dernier coup de pouce en la matière remonte à 2012 : le 26 juin 2012, le gouvernement Ayrault avait ainsi augmenté le Smic de 0,6% en plus des 1,4% d'augmentation au titre de l'inflation (lien archivé ici). Mais ces augmentations discrétionnaires sont rares : la précédente datait de 2006, et aucune n'a été décidée depuis.

Ces mesures concernent toutes des hausses : le Smic n'a jamais été baissé depuis son adoption, que ce soit en valeur nominale ou en valeur réelle après- inflation. Et pour cause : le code du Travail ne prévoit qu'un seul mécanisme possible, celui d'une revalorisation indexée sur l'inflation, et en aucun cas une baisse. 

Aucune disposition légale ne permet une baisse du Smic, même en cas de déflation ou de crise économique. Modifier le montant du Smic à la baisse nécessiterait ainsi de modifier le Code du Travail en ce sens, une hypothèse très improbable, bien que ponctuellement débattue dans la sphère politique (lien archivé ici).

Les thématiques fiscales et économiques, qui concernent de nombreuses personnes et en font un terrain de choix pour les acteurs de la désinformation, sont souvent l'objet d'infox. L'AFP y a consacré plusieurs articles récemment, à retrouver ici ici. ou .

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