
Non, il ne sera pas obligatoire en 2026 de devenir auto-entrepreneur au-delà de 300 euros de ventes sur Vinted ou Leboncoin
- Publié le 10 octobre 2025 à 15:35
- Lecture : 4 min
- Par : Dounia MAHIEDDINE, AFP France
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Plus d'un Français sur deux déclare s'informer via les réseaux sociaux, selon plusieurs enquêtes d'opinion récentes, et sur TikTok, de nombreux comptes se présentant comme des médias d'actualité rassemblent des dizaines de milliers d'abonnés. Mais derrière une apparence de sérieux, certains diffusent régulièrement de fausses informations. Dernier exemple en date : une vidéo devenue virale affirme que toute personne vendant pour plus de 300 euros par an de biens sur Leboncoin, Vinted ou eBay devra se déclarer auto-entrepreneur à partir de 2026. Mais cette affirmation est fausse : aucune loi ni projet de législation n'impose une telle obligation.
"Dès le 1er janvier 2026, vendre plus de 300€ sur Leboncoin ou Vinted obligera à se déclarer auto-entrepreneur et payer des cotisations URSSAF", assure la légende d'une vidéo TikTok vue plus de 800.000 fois depuis le 5 octobre. La séquence est publiée sur un compte suivi par 18.000 abonnés, qui se présente comme une page d'"actus" et de "nouveautés".
Dans la vidéo, une voix off évoque de prétendues déclarations du gouvernement, qui souhaiterait "mieux encadrer la revente entre particuliers" et "réduire le déficit des retraites". Elle affirme aussi que les plateformes seront tenues de transmettre automatiquement aux impôts les revenus générés par leurs utilisateurs.

Dans les commentaires, les réactions indignées se multiplient : "C’est du harcèlement fiscal !", écrit un internaute. "Maintenant je suis auto-entrepreneur parce que je vends mes fringues à 5 € ?", ou encore "Nous sommes des vaches à lait !", ajoutent d'autres utilisateurs.
L'affirmation est également relayée sur Youtube.
Mais elle est fausse : aucune loi n'impose une telle obligation et il n'existe aucune déclaration officielle à ce sujet. Le vote montré dans la vidéo ne concerne d'ailleurs aucun texte lié aux ventes en ligne.
Une loi inexistante
La vidéo virale diffusée sur TikTok cite à tort un vote parlementaire censé mettre en place cette prétendue mesure. Les chiffres qu'elle affiche - "305 voix pour" et "199 contre" - correspondent en réalité au scrutin du 27 mai 2024 sur la proposition de loi relative au droit à l'aide à mourir, sans aucun lien avec la vente en ligne entre particuliers (lien archivé ici).
Aucune disposition légale, ni en vigueur ni en projet, ne prévoit l'obligation pour les particuliers de se déclarer auto-entrepreneurs lorsqu'ils réalisent plus de 300 euros de ventes sur des plateformes comme Vinted, Leboncoin ou eBay. Une recherche sur Legifrance, le site officiel de diffusion du droit français, ne permet de retrouver aucune loi ni décret en ce sens (lien archivé ici).
Contacté par l'AFP le 8 octobre 2025, l'Urssaf, l'organisme qui recouvre les cotisations, a assuré que l'information était fausse.
Selon l'Urssaf, lorsque vous vendez des biens personnels via une plateforme - anciens vêtements, jouets, livres, outils, matériel de puériculture, etc - et que ces ventes restent occasionnelles, vos revenus ne sont soumis ni à cotisations sociales, ni à impôts.
Ces transactions relèvent de la gestion du patrimoine privé et non d'une activité commerciale au sens du Code du commerce. Cependant, les plateformes de revente ont, depuis 2020, l'obligation légale de communiquer certaines informations à l'administration fiscale dans un souci de transparence (lien archivé ici).
Concrètement, elles doivent transmettre chaque année le montant total des ventes et le nombre de transactions des utilisateurs qui ont soit :
- effectué au moins 30 ventes au cours de l'année civile ;
- perçu plus de 2.000 euros sur la même période.
Ces données alimentent automatiquement la déclaration de revenus préremplie du vendeur. Mais, comme le précise le site officiel impots.gouv.fr, ces seuils ne déclenchent pas automatiquement une imposition. Ils servent uniquement à informer l'administration, qui peut ensuite vérifier si les revenus relèvent d'une activité occasionnelle (non imposable) ou commerciale (imposable).
Exemple concret : si une personne revend 32 vêtements d'enfant à 5 euros pièce, soit 160 euros au total, ces ventes ne sont pas imposables, même si le nombre d’opérations dépasse 30. Il s'agit de la simple cession d'objets personnels dont le vendeur n'a plus l'usage (lien archivé ici).
En revanche, si vous achetez ou fabriquez des objets dans le but de les revendre (par exemple bijoux, objets de décoration, vêtements cousus main…), votre activité est considérée comme professionnelle. Dans ce cas, vous devez la déclarer dès le premier euro sur le guichet unique des formalités des entreprises.
Certains cas spécifiques entraînent une fiscalisation (lien archivé ici):
- la vente de métaux précieux ou, au-delà de 5.000 euros, de bijoux, objets d'art, de collection ou d'antiquité, soumise à une taxe forfaitaire sur les métaux et objets précieux ;
- la vente de biens meubles (hors meubles, électroménager et véhicules, qui sont exonérés) d'un montant supérieur à 5.000 euros, soumise au régime de la plus-value sur biens meubles, au taux de 19%.
L'Urssaf précise également à l'AFP qu'aucune évolution réglementaire ne prévoit, en 2026, d'imposer une immatriculation automatique ou le paiement de cotisations sociales dès 300 euros de ventes annuelles pour les particuliers utilisant des plateformes de revente.
Par ailleurs, les seuils de chiffre d’affaires applicables au régime de la micro-entreprise n'ont rien à voir avec les montants évoqués dans les vidéos virales. Ne relèvent du régime de la micro-entreprise (lien archivé ici) que les entrepreneurs individuels dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 188.700 euros pour les activités de vente de biens, 77.700 euros pour les prestations de services relevant des BIC ou des BNC, et 15.000 euros pour la location de meublés de tourisme non classés. Ces plafonds — très supérieurs aux 300 euros mentionnés.
En revanche, à compter du 1er janvier 2027, un changement concernera les auto-entrepreneurs déjà immatriculés : les plateformes numériques devront alors prélever directement les cotisations et contributions sociales dues sur les transactions effectuées via leur intermédiaire. Certaines plateformes volontaires mettront en œuvre ce dispositif de manière anticipée dès 2026.
L'AFP a déjà enquêté sur de fausses affirmations diffusées par de prétendus sites d'actualité sur TikTok comme ici, ici et ici.