Le versement de l'assurance-vie n'est pas remis en cause par la vaccination

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Un texte publié le 12 mars par l'oncologue pédiatrique à la retraite Nicole Delépine, partagé des centaines de fois sur Facebook en Belgique, affirme que le versement d'une assurance-vie ne sera pas effectué dans le cas où une personne décède après avoir été vaccinée contre le Covid-19, car les vaccins autorisés en Europe sont encore en phase expérimentale. Le versement de l'assurance-vie n'est absolument pas remis en cause par la vaccination, a assuré à l'AFP la Fédération des courtiers en assurance de Belgique.  Ces vaccins ne sont par ailleurs plus en phase expérimentale.

"Si vous avez un capital décès sur une assurance-vie, le capital ne sera pas viré à votre bénéficiaire si vous décédez par suite d'un 'vaccin'", peut-on lire depuis le 12 mars sur le site Riposte Laïque, dans un billet publié par Nicole Delépine.

Capture d'écran du site Riposte Laïque, réalisée le 18 mars 2021

Cette ancienne cheffe de service en cancérologie pédiatrique à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris dénonce régulièrement le port du masque, le confinement ou encore la vaccination contre le Covid-19 à l'aide d'arguments infondés, dont certains (1,2) ont déjà été réfutés par l'AFP.

Selon elle, "certaines assurances considèrent que vous avez participé volontairement à une expérimentation" en cas de vaccination contre le Covid-19. En conséquence, vos proches ne percevront pas d'argent de votre contrat d'assurance-vie, une situation "comparable au décès en cas de suicide".

Mme Delépine ne cite pas nommément d'assurance, mais dit s'appuyer sur des témoignages anonymes et des "échanges entre tweetos".

Cet article a été relayé plusieurs centaines de fois sur Facebook et Twitter en Belgique. 

L'AFP avait déjà vérifié une fausse information identique qui portait sur les contrats d'assurance-vie au Canada.

Les vaccins ne sont plus en phase expérimentale
 

"Un traitement est expérimental tant que les essais phase trois n'ont pas été terminés, analysés, publiés et validés par les agences sanitaires et des médecins indépendants des firmes pharmaceutiques", a estimé Nicole Delépine dans son article du 12 mars 2021.

Face à la pandémie, les délais de mise sur le marché des vaccins anti-Covid ont été considérablement raccourcis, alimentant les craintes d'effets indésirables à long terme qui n'auraient pas encore été identifiés, mais cette allégation est fausse.

Quatre vaccins sont autorisés à ce jour dans l’Union européenne, et donc en Belgique et en France: ceux des laboratoires Pfizer/BioNTech, Moderna, AstraZeneca et Johnson & Johnson. Ils ont suivi les étapes imposées à chaque traitement avant une mise sur le marché européen.

Une première phase pour évaluer l'éventuelle nocivité du produit, une deuxième pour le tester sur un nombre limité de malades et une troisième pour juger de l'intérêt thérapeutique auprès d'un échantillon plus étendu. Cette dernière phase avant la mise sur le marché, qui se déroule sur des milliers de volontaires, est bien terminée pour les quatre vaccins homologués comme nous l'expliquions dans cet article.

Pour Nicole Delépine, ces produits seraient encore en cours d'expérimentation, car les vaccins mis au point par BioNTech et Pfizer, Moderna, AstraZeneca et Johnson & Johnson ont reçu une autorisation de mise sur le marché (AMM) dite "conditionnelle", respectivement les 21 décembre, 6 janvier,  29 janvier et 11 mars.

Or, cette AMM conditionnelle permet aux développeurs du vaccin de soumettre des données supplémentaires (études nouvelles ou en cours) après le feu vert des autorités, contrairement à une AMM classique où la totalité des données doit être soumise avant. Dans le cadre de cette procédure d'urgence, qui a permis d'accélérer considérablement la mise à disposition des vaccins contre le Covid, l'EMA a accordé des autorisations pour un an, renouvelables.

Mais cela ne veut pas dire pour autant que les vaccins mis sur le marché n'ont pas été testés correctement. "L'AMM conditionnelle rassemble tous les verrous de contrôles d’une autorisation de mise sur le marché standard pour garantir un niveau élevé de sécurité pour les patients", précise l'Agence nationale du médicament (ANSM). 

En délivrant une AMM conditionnelle, l'Agence européenne des médicaments (EMA), dont un groupe d'experts indépendants a étudié en détails les résultats des essais cliniques du candidat-vaccin, estime que la balance "bénéfice-risque" est respectée, c'est-à-dire que la protection offerte globalement contre le Covid-19 est beaucoup plus importante que les potentiels effets secondaires ou risques induits par le vaccin.

L'EMA souligne ainsi que les vaccins contre le Covid-19 ne peuvent être autorisés en Europe que s'ils "satisfont à toutes les exigences de qualité, de sécurité et d'efficacité définies dans la législation pharmaceutique de l'Union européenne". Une fois toutes les données complémentaires fournies, l'AMM conditionnelle peut être transformée en AMM standard.

Aujourd’hui, les quatre vaccins autorisés font l'objet d'une quatrième phase, dite de pharmacovigilance, pour suivre de près les effets secondaires des vaccins aussi bien en France, par l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), qu'à l'échelle européenne, par l'Agence européenne des médicaments

Le versement de l'assurance-vie pas lié au condition de décès

En Belgique, le contrat d'assurance-vie est un placement financier qui permet de garantir de l'argent supplémentaire pour la vieillesse ou d'assurer un revenu à ses héritiers. Dans chaque contrat d'assurance-vie, le souscripteur désigne un bénéficiaire, qui recevra l'argent épargné en cas de décès. 

En 2019, les compagnies d'assurances belges ont engrangé 28,4 milliards d'euros, assurances-vie et assurances de dommages comprises. 

Le versement de l'assurance-vie n'est absolument pas remis en cause par la vaccination, a indiqué à l'AFP Patrick Cauwert, porte-parole de la Fédération des courtiers en assurances de Belgique : "Ça n'a pas de sens. Cela signifierait que l'assureur doit prouver que la cause unique de la mort est le vaccin et pas une autre comorbidité". 

Seules deux conditions peuvent suspendre le versement de l'argent, a expliqué Patrick Cauwert le 19 mars 2021 : "si c'est un homicide" - si le bénéficiaire est soupçonné d'avoir assassiné le souscripteur, ce qui donne lieu à une enquête, et "le suicide". "Dans la première année de la souscription du contrat, l'assureur peut exclure le suicide des cas de décès couverts (par l'assurance)", a indiqué Patrick Cauwert. Après un an, le bénéficiaire recevra l'argent même si le souscripteur du contrat a mis fin à sa vie. 

La "vaccination n'est pas considérée comme un suicide", ni "comme une expérimentation médicale", a expliqué par téléphone Patrick Cauwerts. Elle est donc bien couverte par les assurances. 

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