Un soignant prépare un vaccin contre la rougeole dans un centre de santé à Lubbock, au Texas, le 27 février 2025 (AFP / Ronaldo SCHEMIDT)

Attention à cette vidéo qui remet en cause la sécurité du vaccin Vaxelis

Vaxelis est un vaccin pédiatrique, autorisé aux Etats-Unis depuis 2018. Sur les réseaux sociaux, un internaute -connu pour propager des fausses informations- remet en question, dans une vidéo très partagée, la sécurité de ce vaccin qui en combine plusieurs (6 en 1). Il alerte notamment sur l'absence de test "contre un placebo inerte" ou sur la présence de composants prétendument dangereux. Mais ce vaccin a passé tous les tests de sécurité requis avant son autorisation. Et aucun élément dans sa composition ou dans sa notice d’utilisation n’est anormal, assurent des experts interrogés par l’AFP.

"VAXELIS : Encore un vaccin mortel", "Des substances telles que l’aluminium, le formaldéhyde et des antibiotiques présents dans ce vaccin peuvent entraîner des effets secondaires graves, et tout cela sans avoir été testé contre un placebo de manière rigoureuse", affirment plusieurs internautes dans des publications publiées sur X (1, 2, 3) ou Facebook.

Tous partagent une vidéo réalisée par l'américain Jeffrey Barke, membre fondateur de America's Frontline Doctors, un groupe qui relaie régulièrement des fausses informations que l'AFP a déjà vérifiées.

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Capture d'écran d'une publication sur X, réalisée le 08/07/2025. Croix orange ajoutée par l'AFP.
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Capture d'écran d'une publication sur X, réalisée le 08/07/2025. Croix orange ajoutée par l'AFP.

Dans cette vidéo, Jeffrey Barke lit un extrait de la notice d'utilisation du vaccin Vaxelis. Il affirme : "C'est vraiment dingue. [...] Les études qui ont mis ce produit sur le marché - il n'y a pas une seule étude randomisée contrôlée avec un placebo inerte. Il n'a été testé que contre d'autres vaccins", suggérant qu'il y a des raisons de s'inquiéter.

Des affirmations similaires ont été partagées en anglais, en allemand, en espagnol ou en croate

Cependant, le vaccin Vaxelis a bien respecté toutes les études de sécurité préalables et a été approuvé aux Etats-Unis en 2018 après une évaluation approfondie par des experts scientifiques et médicaux de l'Agence américaine du médicament (FDA).

Un vaccin hexavalent

Vaxelis est un vaccin hexavalent (c'est-à-dire en combinant six) pédiatrique, administré pour prévenir simultanément les infections causées par la coqueluche, la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, l'Haemophilus influenzae de type b et l'hépatite B, peut-on lire sur le site de référence MesVaccins (lien archivé ici).

Comme détaillé dans cet article de l'AFP, avant d'être approuvés, "les vaccins sont soumis à des tests parmi les plus rigoureux de toutes les interventions médicales", avait souligné David Higgins, chercheur à l'Ecole de médecine de l'Université du Colorado (lien archivé ici).

"Les vaccins pédiatriques sont testés spécifiquement pour vérifier leur sécurité et leur efficacité chez les enfants avant d'être recommandés", avait-il encore précisé.

Après une phase préclinique (en laboratoire), les vaccins font l'objet d'essais cliniques. Une fois les essais terminés, "les vaccins font l'objet d'un examen réglementaire au cours duquel toutes les données issues des essais précliniques et cliniques sont examinées de manière indépendante", continuait David Higgins.

En effet, c'est alors au tour des experts médicaux et scientifiques de la FDA d'examiner les données "pour s'assurer que le vaccin est sûr et efficace et que les avantages l'emportent sur les risques" éventuels, explique sur son site le ministère américain de la Santé et des Services sociaux (lien archivé ici). 

"Après cette évaluation des informations cliniques et de fabrication, la FDA décide d'approuver ou non l'utilisation du vaccin."

Pour le vaccin Vaxelis, la FDA a approuvé en décembre 2018 ce traitement, produit par les sociétés pharmaceutiques Sanofi Pasteur et Merck, pour les enfants âgés de six semaines à quatre ans (lien archivé ici).

Une fois un vaccin approuvé, le Comité consultatif sur les pratiques de vaccination (Advisory Committee on Immunization Practices, ACIP) - composé d'experts médicaux et de santé publique - examine alors à nouveau de son côté les données des essais cliniques, et décident de recommander ou non l'inclusion du vaccin dans le calendrier des vaccinations recommandées (lien archivé ici). 

Si l'ACIP recommande à son tour le vaccin, le directeur des Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC) procède à un examen final et approuve ou refuse la recommandation.

Kelly Moore, présidente et directrice générale de l'organisation à but non lucratif Immunize.org et coauteure de la déclaration de politique pour Vaxelis de l'ACIP (lien archivé ici), a déclaré à l'AFP le 2 juin que c'était "un excellent vaccin".

En février 2019, l'ACIP a ainsi indiqué que le vaccin Vaxelis avait fait l'objet de six études cliniques portant sur plus de 5.000 nourrissons âgés de 6 à 12 semaines (lien archivé ici). Le comité a ensuite déclaré que les études avaient montré que Vaxelis "avait un profil de sécurité acceptable qui est cohérent avec les vaccins qui le composent". 

Une question d'"éthique"

Comme l'affirme Jeffrey Barke dans sa vidéo, le vaccin Vaxelis n'a pas été testé contre "un placebo inerte". Cependant, cela n'a rien d'anormal et ne signifie pas que le vaccin n'est pas sûr.

En effet, les nouveaux vaccins développés pour lutter contre des maladies pour lesquelles il n'existe pas déjà de vaccin sont soumis à des essais contrôlés par placebo, comme cela a été le cas pour les vaccins contre le Covid-19 par exemple.

Mais, pour les maladies pour lesquelles il existe déjà un vaccin, la communauté médicale considère qu'il ne serait pas "éthique" de procéder à des essais contrôlés par placebo, car cela priverait des adultes ou des enfants d'un vaccin efficace qui pourrait les protéger, comme expliqué toujours dans cet article.

Kelly Moore a souligné que les participants aux essais cliniques doivent se voir offrir la norme de soins existante. Il serait donc "tout à fait contraire à l'éthique" de refuser les vaccins existants tout en testant un produit combiné qui contient des composants déjà administrés de manière routinière sous forme d'injections séparées, a-t-elle ajouté. 

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'est également opposée aux demandes de modification des tests de vaccination. 

"La sécurité des vaccins est soumise à des normes extrêmement strictes", a déclaré Kate O'Brien, responsable des vaccins à l'OMS, le 1er mai 2025 (lien archivé ici). Elle a, à son tour, souligné qu'il serait contraire à l'éthique de donner à des sujets d'expérience un placebo à la place de "vaccins qui sauvent des vies et qui sont déjà homologués".

En Europe, l'autorisation de mise sur le marché (AMM) du vaccin Vaxelis a été obtenue le 15 février 2016 (lien archivé ici). La Commission de la transparence a ensuite publié un avis le 11 octobre 2017 sur le service médical rendu et l'intérêt de ce vaccin pour la santé publique (lien archivé ici).

Vaxelis a été mis à disposition en France en avril 2018, en alternative aux deux autres vaccins existants, Infanrix Hexa et Hexyon (lien archivé ici). La Haute autorité de santé (HAS) a, elle, rendu le 20 avril 2022 un avis favorable au remboursement de ce vaccin chez les nourrissons à partir de l’âge de 6 semaines (lien archivé ici).

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Un vaccin contre la grippe est administré dans un centre de dépistage Covid-19, le 24 novembre 2020, à San Fernando, en Californie, au nord-est de la ville de Los Angeles. (AFP / Robyn BECK)

Une interprétation erronée 

Jeffrey Barke induit également en erreur lorsqu'il s'insurge de la section 13.1 de la notice d'utilisation du vaccin, qui indique que Vaxelis n'a pas été évalué pour son "potentiel cancérigène ou mutagène ou pour l'altération de la fertilité".

En effet, cette formulation figure en réalité dans les documents relatifs à de nombreux vaccins de routine, explique le groupe de soins de santé américain Novant Health sur son site internet (lien archivé ici).

"Cela signifie simplement qu'il n'était pas nécessaire de procéder à d'autres tests, car les études toxicologiques menées lors de la phase préclinique n'ont révélé aucun signe d'effets indésirables du vaccin ou de ses composants individuels", indique le groupe. 

Quant à la fertilité, il existe des lignes directrices et des règles spécifiques pour déterminer quand un fabricant doit réaliser des études sur ce sujet. Avec un vaccin approuvé uniquement pour les populations de moins de cinq ans, des études sur les animaux en gestation n'ont pas lieu d'être, a décrypté à l'AFP le 4 juin Kathryn Edwards, experte en vaccinologie au centre médical de l'université Vanderbilt (lien archivé ici).

"Ces vaccins sont utilisés individuellement depuis des décennies, chez des millions de personnes, et il n'y a pas eu de signal d'infertilité ni de raison biologique de s'inquiéter", a-t-elle déclaré.

Les vaccins six-en-un, comme Vaxelis, ont été développés pour réduire le nombre d'injections chez les enfants, "réduire la charge liée à la gestion de plusieurs vaccins distincts et assurer l'administration en temps voulu de tous les vaccins nécessaires", a-t-elle ajouté.

Pour rappel, les vaccins n'arrêtent pas d'être étudiés une fois approuvés. Ils font ensuite "l'objet d'une surveillance continue en vie réelle grâce à des systèmes tels que le Vaccine Adverse Event Reporting System (VAERS) et le Vaccine Safety Datalink (VSD) des CDC, afin de repérer tout effet indésirable rare", avait développé David Higgins. Cette surveillance permet de détecter des effets secondaires qui n'auraient pas été observés lors des essais cliniques.

"Il a été démontré que les vaccins combinés ne sont pas plus réactifs que les vaccins séparés, et aucune complication à long terme n'a été observée avec les vaccins combinés", a également indiqué Mme Edwards.

Ce type de traitement présente plusieurs avantages, notamment une augmentation des taux de couverture, une réduction du nombre de visites de soins de santé supplémentaires et une diminution des coûts de distribution du produit, souligne encore les CDC américains, ces centres qui forment la principale agence sanitaire du pays (lien archivé ici). 

Les effets indésirables 

Dans sa vidéo, Jeffrey Barke met en avant que le vaccin peut avoir pour effet secondaire le syndrome de Guillain-Barré, une maladie dans laquelle le système immunitaire attaque les nerfs, provoquant parfois une paralysie temporaire. Il mentionne également le risque d'apnée, qui est une pause dans la respiration. 

Concernant le syndrome de Guillain-Barré, celui-ci est "très rare chez les enfants", précise Mme Edward, et la plupart des enfants diagnostiqués "se rétablissent complètement sans complications", ajoute l'hôpital Cedars Sinai (lien archivé ici).

De son côté, Rachel Greenberg, professeur agrégée de pédiatrie à la faculté de médecine de l'université Duke, a étudié les risques d'apnée liés à la vaccination des prématurés (lien archivé ici). "Bien qu'il existe un risque accru temporaire d'apnée après la vaccination, le risque posé par les infections respiratoires et autres infections évitables par la vaccination chez les nourrissons non vaccinés est bien plus élevé", a-t-elle conclu dans un communiqué de presse concernant son étude en janvier 2025 (lien archivé ici).

Comme la plupart des vaccins, les effets secondaires les plus courants signalés après une injection de Vaxelis sont une douleur ou un gonflement au point d'injection et de la fièvre (lien archivé ici).

Melody Butler, directrice exécutive fondatrice de l'association Nurses Who Vaccinate, a appelé à se rappeler combien d'enfants meurent encore de maladies évitables par la vaccination (lien archivé ici): "Nous sommes tellement gâtés que nous ne savons même pas ce que ces maladies font au corps humain. Nous avons beaucoup de chance de ne pas voir ces maladies de nos propres yeux", a-t-elle déclaré à l'AFP le 4 juin.

Les composants

Jeffrey Barke cible également les composants du vaccin, mettant en cause l'aluminium et le formaldéhyde.

L'aluminium se trouve naturellement dans l'environnement et les humains l'ingèrent par l'intermédiaire de l'eau potable et de certains aliments, notamment le lait maternel et les préparations pour nourrissons (lien archivé ici). 

Dans certains vaccins, des sels d'aluminium (hydroxyde d'aluminium, phosphate d’aluminium, et sulfate de potassium et d'aluminium) sont utilisés comme adjuvants, afin d’améliorer la réponse immunitaire. "Une fois le vaccin injecté à une personne à l’aide d’une seringue, ces adjuvants servent à «retenir» les antigènes (les composants actifs du vaccin) au point d'injection et à y attirer les cellules du système immunitaire pour améliorer l’efficacité du vaccin", détaille le site d'information sur les vaccins Infovac (lien archivé ici).

Ces sels d’aluminium sont utilisés depuis plus de 90 ans dans les vaccins et les études menées n'ont jamais établi de lien "avec des effets secondaires durables ou graves", ni " avec un taux accru d'allergies ou de maladies immunitaires".

Le formaldéhyde, quant à lui, peut être utilisé pour "inactiver les virus ou les toxines composant les vaccins" (lien archivé ici). Mais, "il a plus de formaldéhyde dans une pomme ou une poire que dans un vaccin", a déclaré M. Butler, qualifiant de "négligeables" les quantités résiduelles transmises à l'organisme lors de la vaccination.

Les vaccins font l'objet d'une désinformation importante et régulière sur les réseaux sociaux. Aux Etats-Unis et au Canada, les fausses informations semblent même contribuer à la baisse des taux de vaccination. Retrouvez ici tous les articles de vérification de l'AFP concernant des sujets de santé.

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