Non, AstraZeneca n'a pas été forcée par l'EMA de retirer son vaccin Covid du marché

Le laboratoire britannique AstraZeneca a annoncé le 8 mai qu'il retirait de la vente son vaccin contre le Covid-19 Vaxzevria. Des internautes assurent que l'EMA, l'Agence européenne du médicament, lui aurait retiré son autorisation de mise sur le marché en raison d'effets indésirables graves. Attention : les effets indésirables provoqués par Vaxzevria sont extrêmement rares et le vaccin présente toujours un profil de risque sûr, selon l'EMA. Celle-ci confirme aussi que c'est bien le laboratoire qui est à l'origine du retrait du produit, considéré comme n'étant plus adapté à la demande.

"Cet arrêt d'AstraZeneca n'est pas lié à un déclin de la demande... mais à un retrait de son autorisation de mise sur le marché par l'EMA pour 'effets indésirables'!!" écrit sur X le 8 mai le compte "l'infotox".

D'autres se félicitent de ce retrait, qui selon eux vient valider ce qu'ils dénoncent depuis 2021, comme cet internaute qui écrit: "Vaccin astrazeneca enfin retiré par l’EMA : Didier raoult fut le premier à lancer l’alarme sur les effets secondaires très graves de ce produit. Merci à lui ! Enfin les autorités sanitaires écoutent la médecine et la science. 3 ans de retard", dans une publication du 8 mai, partagée à plus de 400 reprises et accompagnée d'un portrait du très contesté ex-patron de l'IHU de Marseille.

Sur Facebook aussi, de nombreuses personnes affirment que "La commission européenne retire le vaccin AstraZeneca du marché", liant cette information au fait que le vaccin "a été reconnu  responsable de thromboses", comme cette publication partagée une centaine de fois. 

Des affirmations trompeuses très virales sur les réseaux sociaux dans de nombreuses langues, notamment en tchèque où un candidat anti-système aux élections européennes explique: "l'autorisation de mise sur le marché du vaccin d'AstraZeneca dans toute l'Europe a été retirée le 7 mai 2024. La vérité est toujours une question de temps... nous alertons sur ça depuis trois ans".

Mais contrairement à ce qu'affirment ces internautes, l'EMA n'est pas à l'origine du retrait d'AMM. 

Le retrait du marché, une "décision volontaire" d'AstraZeneca

La Commission européenne a annoncé en mars 2024 avoir initié un retrait de l'AMM de Vaxzevria (archive), "à la demande du propriétaire".

Le 7 mai, l'EMA a donc logiquement publié une information selon laquelle le vaccin ne serait plus autorisé dans l'UE (archive). Là encore, l'EMA précise sur son site que l'autorisation de mise sur le marché de Vaxzevria "a été retirée à la demande du titulaire de l'AMM".

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Des fioles du vaccin Covid Vaxzervria, près de Chesterfield, le 14 avril 2021. (AFP / OLI SCARFF)

Un porte-parole de l'EMA a confirmé à l'AFP Factuel le 13 mai qu'AstraZeneca avait demandé le retrait du vaccin: "AstraZeneca a informé la Commission européenne de sa décision d'arrêter définitivement la commercialisation du produit pour des raisons commerciales".

"C'est une décision volontaire qu'un groupe peut prendre unilatéralement, mais il y a une procédure à suivre pour retirer légalement l'autorisation de mise sur le marché sur le marché européen", a détaillé l'EMA.

L'agence a rappelé que "la balance bénéfice/risque du vaccin était positive" et que "la décision prise par le groupe de retirer le vaccin est purement commerciale".

C'est aussi ce qu'a confirmé à l'AFP la porte-parole d'AstraZeneca, Fiona Cookson, contactée par email le 15 mai: "AstraZeneca est à l'origine du retrait, pas l'EMA, et ceci en raison d'un manque de commandes dû à l'arriver de nouveaux vaccins adaptés aux nouveaux variants du Covid".

Des effets indésirables et des procès

Ce vaccin, l'un des tout premiers sur le marché alors même que les vaccins n'étaient pas la spécialité d'Astrazeneca, avait subi plusieurs revers, notamment un feu vert de commercialisation qui n'est jamais arrivé aux États-Unis, et des problèmes de livraison en Europe (archive).

De rares cas d'effets indésirables graves ont aussi assombri le destin du  vaccin: AstraZeneca a dû mettre à jour en avril 2021, avec l'accord du régulateur britannique MHRA, les informations sur le Vaxzevria pour inclure la possibilité qu'il déclenche dans de rares cas des thromboses.

Les syndromes de thromboses en question, les thrombopénies (TTS), engendrent la formation d'un caillot de sang avec des conséquences potentiellement mortelles. Ce syndrome rare est survenu chez environ 2 à 3 personnes sur 100.000 qui ont été vaccinées avec le vaccin d'AstraZeneca.

Le groupe fait face à plusieurs procédures juridiques sur les conséquences du vaccin, notamment l'une au Royaume-Uni menée au nom de 51 plaignants.

Les vaccins AstraZeneca et Johnson & Johnson (Janssen en Europe) avaient rapidement été largement abandonnés au profit de ceux de Pfizer-BioNTech et Moderna, tous deux à ARN messager, dans les pays européens.

AstraZeneca et Johnson & Johnson avaient toutefois gardé une place centrale dans Covax, un dispositif d'aide internationale à la vaccination Covid via un programme de l'ONU, du fait de son moindre coût et de sa facilité de production et de distribution (archive).

Le vaccin d'AstraZeneca a été l'objet de nombreuses infox dans le passé, sur son inefficacité supposée notamment, mais aussi et surtout sur le risque de thrombose, largement amplifié et exagéré par des publications trompeuses.

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