Attention, cette photo d'une femme protégeant son enfant au Soudan a été générée par IA
- Publié le 29 octobre 2025 à 18:22
- Lecture : 3 min
- Par : Dounia MAHIEDDINE, AFP France
Copyright AFP 2017-2025. Toute réutilisation commerciale du contenu est sujet à un abonnement. Cliquez ici pour en savoir plus.
Après la meurtrière prise d'El-Facher le 26 octobre à leurs rivaux à l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) contrôlent désormais l'ensemble du Darfour, vaste région de l'ouest du Soudan couvrant le tiers du pays. Alors que de très nombreuses images et vidéos authentiques de violences et exactions circulent sur les réseaux sociaux, une photo virale montrant une femme tenant un enfant face aux ombres de deux hommes armés a été partagée plusieurs centaines de fois en quelques heures. Mais contrairement à ce qu’affirment de nombreux internautes, il ne s’agit pas d’une photo réelle, mais d’une image générée par intelligence artificielle.
Le pouvoir au Soudan a accusé le 29 octobre 2025 les paramilitaires d'avoir ciblé les mosquées et le Croissant-Rouge à El-Facher lors de leur prise de cette ville clé, où "les massacres continuent" selon des images satellite analysées par le Humanitarian Research Lab de Yale (lien archivé ici).
Après la prise d'El-Facher le 26 octobre à leurs rivaux, l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) contrôlent désormais l'ensemble du Darfour, vaste région de l'ouest du Soudan couvrant le tiers du pays.
Commandées par le général Mohamed Daglo, les FSR, qui ont installé au Darfour une administration parallèle, contrôlent désormais l'ouest du Soudan et certaines parties du sud, avec leurs alliés. L'armée contrôle le nord, l'est et le centre du pays ravagé par plus de deux ans de guerre (lien archivé: ici).
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a réclamé le 29 octobre un "cessez-le-feu" au Soudan, après des informations faisant état de plus de 460 personnes tuées dans une maternité à El-Facher. (archive ici).
L'OMS "est consternée et profondément choquée par les informations faisant état du meurtre tragique de plus de 460 patients et accompagnateurs à la maternité saoudienne d'El-Facher, au Soudan, à la suite des récentes attaques et de l'enlèvement de travailleurs de la santé", a-t-elle indiqué sur le réseau social X.
L'Union européenne a aussi dénoncé la "brutalité" des paramilitaires au Soudan et le ciblage "ethnique" de civils, après le "tournant dangereux" de la prise de la ville d'El-Facher.
A El-Facher, les Forces conjointes, alliées de l'armée, ont accusé les Forces de soutien rapide (FSR) d'avoir exécuté "plus de 2.000 civils désarmés" dimanche et lundi, "la plupart des femmes, des enfants et des personnes âgées".
C’est dans ce contexte que circule, en français (1,2,3,4,5,6), en arabe et en anglais, une image montrant une femme assise dans le sable, serrant un enfant contre elle, tandis que les ombres de deux personnes tenant des fusils d’assaut se projettent vers eux.
"Ô Soudan, que tu es triste, quand une mère serre son fils dans ses bras avant qu’ils ne soient exécutés ensemble", écrit un internaute sur X, où l’image a été partagée un millier de fois.
Mais après vérification, il s’avère que l’image a été générée par intelligence artificielle.
Remonter à la source
En période de conflits, la circulation de nombreuses photos et vidéos manipulées ou sorties de leurs contextes est fréquente. En observant de plus près l’image, on distingue la mention "@khoubaibf.bz" inscrite sur le cliché.
Une recherche sur Instagram renvoie vers le profil correspondant, dont la biographie le présente comme un "Creative AI Specialist" (spécialiste de la création par intelligence artificielle, en français) (lien archivé: ici).
Ce compte publie régulièrement des images générées artificiellement. La photo virale y figure également, accompagnée d’une indication précisant qu’elle a été produite à l’aide d’outils d’intelligence artificielle.
El-Facher, front le plus disputé du conflit, était la dernière ville de la vaste région du Darfour encore tenue par l'armée avant sa retraite, laissant le contrôle aux paramilitaires engagés depuis avril 2023 dans une guerre meurtrière pour le pouvoir.
Depuis mai 2024, la ville est assiégée par les paramilitaires qui tentaient de s'en emparer, laissant des centaines de milliers de civils exposés à la faim, au manque de soins et à l'insécurité.
Selon l'ONU, plus d'un million de personnes ont fui El-Facher depuis le début du conflit (lien archivé: ici).
Les FSR contrôlent désormais l'ensemble du Darfour, une région aussi vaste que la France, où une administration parallèle défie le pouvoir du général Burhane, dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, basé à Port-Soudan, à l'est.
L'armée, quant à elle, est désormais cantonnée au nord, au centre et à l'est du pays, exclue d'un tiers du territoire soudanais (lien archivé: ici).
Entrée dans sa troisième année, la guerre a tué des dizaines de milliers de personnes, déraciné des millions d'autres et plongé le pays dans ce que l'ONU décrit comme "la pire crise humanitaire au monde."
