Covid-19 : bien porté, le masque n'est pas dangereux pour la santé
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- Publié le 03 septembre 2020 à 15:45
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- Par : AFP France
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"Le masque porte atteinte à l'intégrité physique de la personne", avance le texte d'un visuel partagé dans plusieurs publications (1,2,3) depuis la mi-août.
Selon le visuel, le port du masque peut avoir trois conséquences graves sur la santé: l'hypoxie, l'hypercapnie et, en conséquence, la dégradation du système immunitaire. Ces trois affirmations sont erronées.
Le port du masque n'entraîne pas un manque d'oxygène dangereux pour la santé
"Le terme hypoxie désigne une situation où la disponibilité en oxygène est réduite", peut-on lire sur le site du laboratoire hypoxie-physiopathologie de l'université Grenoble-Alpes (UGA).
Cet état peut causer de nombreux effets délétères pour l'organisme (évanouissement, désorientation, problèmes de coordination, troubles cardiaques, etc...)
Contacté par l'AFP, le docteur Emilio Herrera, professeur de physiopathologie et expert en hypoxie à l'université du Chili à Santiago, exclut que les masques de protection puissent entraîner un manque d'oxygène suffisant pour déclencher une hypoxie.
"Ils ne peuvent pas générer une hypoxie. Pour cela, il faudrait que le masque soit hermétiquement collé à notre peau. Ce que limite les masques de protection, c'est l'entrée de molécules plus grandes", qui pourraient contenir des traces de virus, a-t-il expliqué.
Un avis partagé par la docteure Shelley Paine, directrice du centre de recherches sur les maladies infectieuses LaMontagne au Texas (Etats-Unis). "Un masque porté correctement ne causera pas d'hypoxie", a-t-elle assuré à l'AFP.
"Si une personne utilisant un masque souffre d'hypoxie, alors c'est qu'il est mis de manière trop restrictive ou que cette personne a des antécédents médicaux la rendant plus vulnérable", a expliqué le Dr John Criscione, professeur d'ingénierie biomédicale à l'université du Texas à l'AFP.
Contacté par l'AFP, Claudio Méndez, professeur de santé publique à l'université australe du Chili, a également exclu que l'utilisation d'un masque puisse générer une hypoxie, tant que le matériau permet à l'air de passer.
"Jusqu'à présent, les masques N95 (équivalents des FFP2, ndlr) - ou les masques en tissus - ont été testés pour ne pas altérer les fonctions physiologiques des personnes", a ajouté M. Méndez.
"Les masques, notamment chirurgicaux, sont conçus pour être portés pendant une durée de plusieurs heures par les professionnels de santé, sans entraver leurs capacités à travailler, ni altérer leurs capacités respiratoires", a noté Eric d’Ortenzio, épidémiologiste à l’Inserm.
"C’est un fantasme", a confirmé à l’AFP Yves Coppieters, médecin épidémiologiste et professeur de santé publique à l’Université Libre de Bruxelles (ULB): "Le masque peut éventuellement diminuer légèrement l’apport en oxygène et gêner la respiration d’une personne avec des problèmes cardiaques ou respiratoires ou en cas de grand effort physique comme un jogging", explique-t-il.
"Il peut aussi y avoir une sensation d'inconfort qui provoque une impression d’étouffer, mais c’est psychologique. Dans le cas d'une personne en bonne santé, il n’empêche pas du tout d’effectuer des activités quotidiennes normalement", a-t-il ajouté.
Le port du masque n'entraîne pas une hypercapnie
"L'utilisation prolongée du masque de protection, y compris le N95 -équivalent du FFP2 en France, NDLR - n'a pas été reliée à des cas d'empoisonnement au dioxyde de carbone chez les personnes en bonne santé. Si du CO2 s'accumule dans le masque, c'est dans de petites quantités tolérables", a estimé Vinita Dubey, médecin hygiéniste à l'agence de santé publique de Toronto au Canada, dans un mail à l'AFP.
"Un masque n'est pas un circuit fermé. Presque tout l'air expiré s'échappe du masque donc vous ne respirez pas votre propre CO2", a également assuré à l'AFP le docteur Shane Shapera, directeur du programme des maladies pulmonaires de l'hôpital public de Toronto et enseignant à la faculté de médecine de la ville.
Dans certains cas, "des individus peuvent ressentir de l'inconfort en portant un masque. L'anxiété peut entraîner de l'hyperventilation qui, elle, peut causer des maux de tête et des vertiges", a estimé Mme Vinita Dubey.
Mais cette sensation d'inconfort est différente de situations graves comme l'hypoxie ou l'hypercapnie.
"Si certaines personnes peuvent se sentir gênées par le fait de porter un masque, c’est par manque d’habitude: ces protections sont développées de manière à laisser passer l’oxygène dans l’organisme. Le risque d’une intoxication au CO2 n’est aucunement avéré", selon Eric d’Ortenzio
Le port du masque ne cause pas une dégradation du système immunitaire
Il est vrai qu'un organisme stressé par un manque d’oxygène libère du cortisol et qu'en conséquence, le système immunitaire est affaibli, a observé Jean-Luc Gala, chef de clinique à la clinique universitaire Saint Luc à Bruxelles et spécialiste des maladies infectieuses.
Mais comme expliqué précédemment, les masques ne diminuent pas l’apport en oxygène et n’augmentent pas l’apport en dioxyde de carbone. "Le masque filtre le virus, mais pas les molécules. Un virus est beaucoup plus gros qu’une molécule d’oxygène ou de dioxyde de carbone", a assuré M. Gala.
Les masques n’ont par conséquent aucun impact sur le système immunitaire: "Les personnels de santé passent huit heures par jour avec un masque et ils ne développent pas d’infection secondaire ou de problèmes de santé", a rappelé Yves Coppieters, médecin épidémiologiste et professeur de santé publique à l’Université Libre de Bruxelles (ULB).