Non, Giorgia Meloni n'a pas déclaré que la France allait devenir un "pays pauvre"
- Publié le 28 novembre 2025 à 12:12
- Lecture : 3 min
- Par : Dounia MAHIEDDINE, AFP France
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Les relations entre Emmanuel Macron et Giorgia Meloni ont été marquées par des tensions ces derniers mois. Dans ce contexte, une vidéo virale attribue à la cheffe du gouvernement italien une déclaration selon laquelle la France allait devenir "un pays pauvre", en raison de la politique menée par le chef d'Etat français. Mais la dirigeante italienne n'a pas tenu de propos de ce type, du moins publiquement. Et le compte TikTok à l'origine de la séquence virale a indiqué à l'AFP l'avoir fabriquée de toutes pièces, dans le but de gagner de l'argent en misant sur sa viralité.
Une série de vidéos misent en ligne sur TikTok (1, 2, 3), visionnées en cumulé des centaines de milliers de fois et "aimées" par des dizaines de milliers de personnes, mettent en scène la cheffe du gouvernement italien Giorgia Meloni s'exprimant devant un micro. Présentée comme celle de la dirigeante, la voix que l'on entend, en français avec un accent italien, affirme que la France serait "tôt ou tard" classée parmi "les pays pauvres" si le président français "continue ainsi".
Toutes ces vidéos dénoncent pêle-mêle la volonté d'Emmanuel Macron de "créer une armée européenne pour lutter contre Poutine", qui ferait tomber "les Européens dans un piège" et le "fardeau du franc CFA" pour l'Afrique. "L'Italie n'a jamais pillé les ressources africaines, ni colonisé économiquement le peuple africain", peut-on aussi entendre dans un français quasi-parfait.
Le montage combine de véritables images de la présidente du Conseil italien à des visuels d'Emmanuel Macron.
Mais il n'existe aucune trace de ces prétendues déclarations et la vidéo a été générée par intelligence artificielle (IA).
Une vidéo issue de faux comptes d'actualité
Nous n'avons trouvé aucune trace de ces propos dans les discours officiels et interventions publiques récentes de Giorgia Meloni et aucun média italien ou français n'a rapporté de telles déclarations. Or il apparaît hautement improbable qu'une déclaration aussi virulente, si elle avait réellement été prononcée par la cheffe du gouvernement italien, soit passée inaperçue.
La vidéo repose en réalité sur un contenu manipulé, attribuant à la dirigeante des déclarations qu'elle n'a pas tenues.
Une recherche d'images inversées permet de retrouver la séquence originale utilisée par plusieurs publications: elle date d'avril 2025 et montre Giorgia Meloni s'exprimant en italien pour rendre hommage au pape François (lien archivé ici).
Dans la version virale, l'audio en français présente par ailleurs des chevauchements de mots. L'outil de détection "Detecting-IA" confirme que la piste sonore a été altérée.
La vidéo manipulée semble surtout viser un public francophone en Afrique, en mettant en avant le thème sensible du franc CFA, monnaie héritée de la période coloniale et régulièrement objet de contestation.
Contacté le 25 novembre par l'AFP, l’un des comptes TikTok ayant relayé la séquence affirme, sous couvert d’anonymat, avoir utilisé "une voix off générée par IA" et réalisé le montage lui-même. Il dit s'être inspiré d'une vidéo similaire déjà virale en août, qu'il a remise en circulation pour obtenir des revenus grâce à la monétisation de TikTok.
"Je ne suis pas trop fier de cette niche. Pour moi, c'était un moyen simple de gagner de l'argent", explique ce jeune étudiant de 19 ans, affirmant avoir touché 60 euros de la plateforme pour la "qualité du contenu" publié.
S'ils reprennent parfois les codes graphiques de médias traditionnels, nombre de ces comptes diffusent régulièrement de la désinformation, avec pour principal objectif de maximiser les partages.
Ils s'inscrivent dans un phénomène ancien, consistant à mêler éléments vrais et faux pour capter l'attention et profiter des algorithmes de certaines plateformes, qui favorisent la circulation de contenus trompeurs et entretiennent un brouillard informationnel. L'AFP Factuel a consacré un article à ces pratiques, à lire ici.
