
Non, il n'est pas possible de voter aux élections canadiennes avec une carte d'électeur décédé
- Publié le 17 avril 2025 à 16:48
- Lecture : 5 min
- Par : AFP Canada, AFP France
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"Je pensais que c'était juste dans les années 60-70 qu'ils faisaient voter les morts dans les élections... Et bien non! Mon grand-père décédé depuis [plus de] 15 ans vient de recevoir sa carte d'électeur ! Il aurait 111 ans cette année", ironise un internaute sur Facebook, photo d'une "carte d'information de l'électeur" pour le scrutin fédéral canadien du 28 avril 2025 à l'appui.
Une publication reprise par d'autres utilisateurs du réseau social (1, 2, 3), qui accusent le Parti libéral au pouvoir d'orchestrer une prétendue fraude à l'élection. "Si tous les morts [renaissent] en 2025 pour les libéraux, on n'est pas sorti du bois", "l'équipe libérale est prête", "les libéraux veulent être sûrs d'être élus", peut-on notamment lire parmi ces commentaires, quand un autre s'insurge que "les morts votent".

Mais ces affirmations sont trompeuses car elles laissent penser, à tort, que des électeurs pourraient usurper l'identité de personnes décédées pour voter le jour du scrutin. Mais c'est infondé, comme l'a pointé à l'AFP le 16 avril 2025 Holly Ann Garnett (lien archivé), co-directrice du Projet d'intégrité électorale, un programme d'études des élections à travers le monde, rappelant que le document partagé sur les réseaux sociaux est une simple "carte d'information" et pas un "permis de voter".
Ainsi que le détaille le site d'Elections Canada (lien archivé), l'organisme indépendant chargé de la conduite des élections et des référendums fédéraux, "des mesures de protection administratives et législatives sont en place pour veiller à ce que seules les personnes admissibles puissent voter et qu'elles ne votent qu'une seule fois, et ce, uniquement pour un candidat dans la circonscription où elles sont inscrites."
Concrètement, pour voter le 28 avril (lien archivé), en plus d'être "citoyen canadien" et d'être âgé d'"au moins 18 ans le jour de l’élection", les électeurs et électrices doivent prouver leur identité. Ils disposent de plusieurs options pour ce faire.
La première consiste à présenter une pièce d'identité : un permis de conduire ou "toute autre carte délivrée par un gouvernement canadien (fédéral, provincial, territorial ou local) portant [...] photo, nom et adresse actuelle".
La deuxième repose sur la présentation de deux pièces d'identité, qui doivent chacune porter le nom de la personne concernée et l'une d'elles préciser son adresse actuelle. Il peut par exemple s'agir de la carte d'information de l'électeur et d'un état de compte bancaire.
Enfin, en l'absence de pièce d'identité, il est possible de voter à condition de faire établir son identité et son adresse en faisant "une déclaration par écrit" et en demandant à une personne de devenir son "répondant". Cette dernière doit connaître la personne qu'elle représente, être inscrite au même bureau de vote, et justifier ses propres identité et adresse.
Un registre d'électeurs "imparfait"
L'envoi de cartes d'information d'électeur à des personnes décédées peut s'expliquer par des manquements au sein du registre national des électeurs canadiens (lien archivé).
"Les cartes d'information de l'électeur reposent sur un registre d'électeurs imparfait. Il est parfois difficile de coordonner les informations entre les deux. Il est facile d'ajouter quelqu'un à cette liste mais c'est plus compliqué d'en rayer quelqu'un", explique Holly Ann Garnett.
Selon la spécialiste, les personnes en charge des listes électorales "ont tendance à se montrer plutôt prudentes, car elles savent que des garde-fous sont en place", de crainte que des citoyens ne se retrouvent "déchus de leurs droits électoraux par accident".
Holly Ann Garnett cite l'exemple d'une personne âgée qui s'installe dans une maison de retraite, ne met pas à jour son permis de conduire et ne transmet pas sa nouvelle adresse aux personnes en charge du scrutin. Il est possible qu'elle reçoive une carte d'information de l'électeur à son ancienne adresse, y compris si elle est décédée entretemps.

Des accusations récurrentes, sur les réseaux sociaux, de fraude aux élections
Les élections législatives anticipées du 28 avril ont été annoncées fin mars par le Premier ministre canadien Mark Carney, qui a succédé à Justin Trudeau et cherche à obtenir, avec son Parti libéral, une majorité au Parlement canadien dans une période de vives tensions avec le puissant voisin américain.
L'expérience d'économiste du Premier ministre canadien Mark Carney, ancien banquier central, est son principal argument dans la campagne électorale, qui se déroule en pleine guerre commerciale avec les Etats-Unis. Mais ses liens avec le monde de la finance en font également une cible de choix pour les théories du complot.
Les accusations de fraude aux élections des scrutins sont devenues récurrentes sur les réseaux sociaux ces dernières années. En France, au lendemain des législatives de l'été 2024, des internautes s'alarmaient d'une prétendue fraude en croyant pointer une baisse du nombre d'inscrits au second tour - à tort.
L'AFP a également vérifié une rumeur sur de prétendus bulletins de votes pour le parti d'extrême droite AfD détruits avant les élections allemandes en février, des allégations infondées sur les machines à voter lors de l'élection présidentielle américaine de 2024, ou encore des accusations fausses contre l'Union européenne et son prétendu pouvoir d'annuler des élections dont les résultats lui déplaisent.