David Breidenstein, le 20 mars 2019 à Paris (AFP / Stéphane de Sakutin)

David Breidenstein

  • Cet article date de plus d'un an
  • Publié le 04 avril 2019 à 08:59
  • Mis à jour le 15 novembre 2019 à 15:07
  • Lecture : 3 min
  • Par : Rémi BANET
Âge 40
Blessé le 16 mars
Lieu de la blessure Paris
Oeil Gauche
Certificat médical consulté Oui
Arme mise en cause LBD
Plainte Oui
Enquête administrative ?

David Breidenstein a été blessé le 16 mars à Paris. L'AFP l'a rencontré à l'hôpital Cochin à Paris, le mercredi 20 mars. A l'occasion des un an du mouvement des "gilets jaunes", nous l'avons recontacté pour faire le point sur sa situation. 

Pourquoi étiez-vous là ?

"Je suis parti de Troyes en train, avec une quarantaine de Troyens. On est descendu à la gare de l'Est, on est monté jusqu'à place de l'Etoile. C'était au moins la septième fois que je venais à Paris [depuis le début du mouvement, ndlr]. Je suis gilet jaune depuis le début".
 

Que s'est-il passé ?

"On est remonté vers l'Etoile, ça a commencé à charger, du coup on est redescendu avec une paire de gilets jaunes. Là ça commençait à gazer un peu, ils ont tiré des grenades pour disperser un peu tout le monde, du coup on s'est écarté. J'étais en train de marcher, j'ai tourné la tête et j'ai pris le tir. On a l’impression de recevoir un gros parpaing dans la tête, tellement la force est monumentale. C’est énorme, ça m’a couché, ça m’a foutu par terre. J’avais juste mon gilet jaune, mon sac à dos, ma clope et c’est tout. J’étais une cible, je marchais tranquillement, je courais pas, j’étais fatigué".

Comment envisagez-vous la suite ?

"Je bosse dans une usine de forge, je fais tout ce qui est pièces d’Airbus. Je suis scieur, au débitage acier. On fait des pièces, il y a des réglages à faire sur les machines, il y a plein de contrôles à faire. Donc sans mon œil je ne sais pas comment ça va se passer".

"Là je suis chez moi, je suis enfermé avec les volets fermés tellement ça fatigue l’autre œil. Dès qu’il y a un peu de soleil, ou le reflet de la télé, ça me fait mal aux yeux, ça me fatigue. Du coup je redors parfois une petite heure pour reposer un peu les yeux mais c’est très très fatigant".
[Ces derniers propos ont été recueillis par téléphone, cinq jours après la sortie d'hôpital de David Breidenstein, ndlr].

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À l'occasion du premier anniversaire de lancement du mouvement, l'AFP a réinterrogé mi-octobre les manifestants éborgnés.

Voilà ce qu'a dit David Breidenstein à l'AFP :

Aujourd'hui, David Breidenstein dit subir un "syndrome post-traumatique, comme tous les blessés dans le même cas. On a plus envie de vivre". 

"Depuis sept mois j’ai des images qui me réveillent la nuit. Je me vois la tête en sang, l’oeil en sang. Je me revois en train d’appeler les street medics. C’est comme ça toutes les nuits depuis 6 mois. C’est très dur à vivre niveau famille. J’ai du mal à me regarder dans le miroir"
.

Cet ouvrier, scieur dans une usine de forge, n'a toujours pas repris le travail: "Ca fait sept mois que je suis à l’arrêt. Sans prothèse (oculaire), je ne peux pas reprendre (ndlr il espère reprendre fin novembre). Je ne sais pas à quel poste je vais être affecté."

Pour lui le mouvement ne va pas s'essoufler: a va continuer, peut-être différemment. Marcher dans la rue ça ne change rien. On se fait gazer, on se fait taper dessus et on a rien de plus. On fait la manif le samedi et on rentre le dimanche avec nos problèmes. J’ai de la rancoeur, et tous les week-ends on voit encore des blessés. On a la haine" a-t-il confié à l'AFP. 

Situation judiciaire : une enquête de l'IGPN (Inspection Générale de la Police Nationale) a été ouverte début octobre. David Breidenstein a déclaré à l'AFP n'avoir toujours pas été convoqué par l'IGPN à la mi-octobre. 

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Retrouvez notre dossier sur les manifestants, passants, lycéens grièvement blessés à l'oeil durant l'hiver 2018-2019. 

EDIT 13/11 : article mis à jour avec un nouveau témoignage + la situation judiciaire

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