Covid-19 : Non, ces images de chercheurs en combinaison ne prouvent pas que les masques sont inefficaces
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- Publié le 05 octobre 2020 à 16:45
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- Par : AFP France
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"Témoignage d'une biologiste. Voici à quoi on ressemble lorsque nous devons nous protéger d'un virus véritablement létal. Le morceau de papier ou de tissu que vous porter sur le nez vous rendra malade à cause des moisissures, des champignons, des virus et des bactéries qui s'y accumulent et ne vous protège aucunement des virus", citent les publications Facebook.
Elles reprennent la même rhétorique que d'autres publications similaires diffusées durant l'été qui ironisent sur l'intérêt de porter un masque.
Mais en laboratoire, "la personne est bien plus exposée au virus que naturellement ou quand elle est devant une personne infectée, parce que les virologues manipulent des échantillons contenant des virus en grande quantité", a expliqué à l'AFP Christophe Batejat, responsable adjoint de la cellule d’intervention biologique d’urgence à l’Institut Pasteur.
"Ça n’a aucun sens de porter ce type d'équipement au quotidien", a abondé Yves Coppieter, médecin épidémiologiste et professeur de santé publique à l’Université Libre de Bruxelles (ULB), contacté par l'AFP. "Le masque fournit une protection proportionnelle aux risques quotidiens de contamination, qui reposent principalement sur l’inhalation de gouttelettes contaminées par la voie respiratoire, ou les mains quand on touche des surfaces contaminées", explique-t-il.
"Dans la vie de tous les jours, où on est moins exposé au virus, le gel hydroalcoolique, le lavage de mains et les masques chirurgicaux suffisent", a ajouté Christophe Batejat.
Masques et mosissures
"Les infections fongiques [liées aux champignons] graves sont rares", a expliqué à l'AFP Françoise Dromer, responsable de l'unité de Mycologie moléculaire et du Centre national de référence des Mycoses invasives et des antifongiques de l’Institut Pasteur. "Dans les conditions d’utilisation recommandées, il n’y a aucun moyen que des champignons se développent à l'intérieur d'un masque", a-t-elle assuré.
"Pour qu’un masque moisisse, il faudrait le laisser, par exemple, humide dans une pièce pleine de moisissure, ou dans un compost, pendant des semaines. La moisissure serait alors visible, comme un citron qui pourrit dans le frigo", ajoute-t-elle.
Pour éviter que le masque moisisse, "il suffit de le remplacer toutes les quatre heures et de laver les masques en tissu au moins une fois par jour à l’eau chaude et avec du savon de Marseille, par exemple. Le virus, les bactéries et la mycose n’y résistent pas", détaille Jean-Luc Gala, chef de la clinique Saint-Luc à Bruxelles et professeur à l'Université catholique de Louvain.
Une photo d'un labo de recherche de niveau 4 au Canada
Quant à la photo qui accompagne les publications qui nous intéresse, elle a été prise dans le National Microbiology Laboratory (Laboratoire national de microbiologie, LNM), un laboratoire de niveau 4 à Winnipeg, au Canada. On peut notamment reconnaître l'endroit dans cette vidéo publiée par la chaîne publique canadienne CBC.
La photo en elle-même est une image d'archive, que l'on retrouve dans cet article du média canadien, datant de juillet 2019, et qui affirme que la photo date de l'année 2017.
L'article mentionne le fait que deux chercheurs ayant des liens avec la Chine ont vu leur accès au laboratoire révoqué par la Gendarmerie royale du Canada pour une possible "violation de la politique" du laboratoire.
Le Dr Xiangguo Qiu, qui a contribué à la mise au point d'un traitement contre le virus Ebola, son mari Keding Cheng, un biologiste qui a publié des articles sur les souches de coronavirus, et les étudiants chinois travaillant sous leur supervision, s'étaient vu retirer leur accès au LNM.
Les laboratoires sont classifiés de 1 à 4 en fonction de leur niveau de sécurité. L’OMS recommande que le diagnostic du Covid-19 à partir de frottis nasaux soient traités dans des laboratoires de type 2, et que les cultures de virus, nécessaires pour la recherche d’un traitement, se fassent dans des laboratoires de type 3. Les différentes normes de sécurité de ces laboratoires peuvent être trouvées ici.