Attention, ce graphique minimisant la gravité du Covid-19 est trompeur

  • Cet article date de plus d'un an
  • Publié le 23 septembre 2020 à 18:30
  • Lecture : 2 min
  • Par : AFP France
Un graphique partagé plus de 10.000 fois sur Facebook depuis le 19 septembre compare le nombre de morts liées au Covid-19 – présenté comme infime – aux décès liés à d’autres causes ou maladies dans le monde. Ces comparaisons sont trompeuses et le bilan des morts liées au nouveau coronavirus est très daté.

Ce diagramme à barres, qui circule depuis le printemps (et avait été cité dans un article de vérification du Monde), a été très partagé ces derniers jours sur Facebook, relayé notamment sur des groupes antimasques.

Image
Capture d'écran Facebook prise le 23/09/2020

Des graphiques similaires avaient circulé au début de la pandémie, comparant là encore le nombre de morts du Covid-19, une maladie infectieuse transmissible, avec des décès causés par des pathologies chroniques comme le cancer, des décès accidentels sur les routes, et des morts provoquées par la malnutrition ou le tabagisme.

Des comparaisons qui, selon Jocelyn Raude, enseignant-chercheur en psychologie sociale à l'Ecole des Hautes études en santé publique (EHESP), n’ont "pas de sens".

"D’un côté, on a des éléments prévisibles, quantifiables, comme les effets du tabac ou de l’alcool, et des maladies dont la prévalence est extrêmement stable d’une année à l’autre, comme le cancer [...] et de l’autre, on a une épidémie très instable par nature, qui peut changer avec des mutations virales, s’endémiser comme la grippe tous les hivers, ou disparaître dans plusieurs mois", expliquait-il en mai à l'AFP. 

Contrairement aux chiffres du cancer ou des morts sur les routes, la progression du coronavirus suit en effet celle d’une courbe épidémique, avec une forte hausse de décès pendant la phase dite exponentielle. "Faire le bilan d’une épidémie alors qu’elle n’est pas terminée n’a pas de sens", abonde Pascal Crépey, enseignant-chercheur en épidémiologie et biostatistiques à l'EHESP.

Le graphique viral sur Facebook semble indiquer que le nouveau coronavirus – pour lequel aucun traitement efficace ou vaccin n'a encore été mis au point – n'a tué que quelques milliers de personnes dans le monde. En réalité, la pandémie de Covid-19 a fait au moins 965.760 morts depuis l'apparition de la maladie fin décembre, selon un bilan établi par l'AFP à partir de sources officielles mardi 23 septembre à 11h00 GMT.

Plus largement, les chiffres figurant sur le diagramme manquent d’une remise en perspective plus générale. Au vu du taux de transmission du Covid-19, des mesures – entre autres – de distanciation physique généralisées ont été nécessaires dans le monde entier, ce qui n’est pas le cas des autres maladies figurant sur le graphique. Des mesures qui, de fait, ont ralenti la progression et l’ampleur de l’épidémie.

Une étude de l’EHESP publiée fin avril indiquait que le confinement aurait évité la mort de 60.000 personnes en France. "Si rien n’avait été fait, le bilan aurait été phénoménal, et il se compterait en millions de décès dans le monde", estimait en mai l’épidémiologiste Pascal Crépey. 

L'épidémie de Covid-19 a engendré en Europe un pic de surmortalité de 50% de décès en plus entre fin mars et début avril, selon des chiffres de l'Insee montrant que la France, l'Espagne, la Belgique et l'Italie ont été les plus touchés.

Vous souhaitez que l'AFP vérifie une information?

Nous contacter