
Aucun plan d’expulsion de ressortissants américains n’a été annoncé par la Namibie
- Publié le 30 avril 2025 à 17:48
- Lecture : 5 min
- Par : Tendai DUBE, AFP Afrique du Sud
- Traduction et adaptation : SUY Kahofi , AFP Côte d'Ivoire
Copyright AFP 2017-2025. Toute réutilisation commerciale du contenu est sujet à un abonnement. Cliquez ici pour en savoir plus.
"Namibie : la première femme présidente du pays a ordonné l'expulsion de 500 Américains", affirme un texte vastement partagé courant avril sur les réseaux sociaux, comme dans cette publication cumulant plus de 77.000 mentions "j'aime" et 6.000 partages.
Selon la publication, cette mesure aurait été prise "en réponse aux opérations d'expulsion de Trump, qui ciblent principalement les Africains". La présidente namibienne Netumbo Nandi-Ndaitwah aurait affirmé que "si l'on ne peut entrer aux États-Unis sans visa, il en va de même pour la Namibie", c’est pourquoi elle aurait par ailleurs "doublé les frais de visa pour les citoyens américains".

Un autre texte affirme que "plus de 500 citoyens américains exploitent des diamants, de l'or, de l'uranium, du cuivre et d'autres minéraux en Namibie sans visa". "Ils ont reçu l'ordre de partir aujourd'hui (1er avril) ou de faire face à un retrait forcé à partir de demain", détaille par exemple cette publication "aimée" environ 700 fois. "La Namibie, l'un des meilleurs producteurs de diamants au monde, prend maintenant le contrôle total de ses mines de diamants", salue le texte.
Des publications similaires ont été partagées en anglais et en français des milliers de fois sur Facebook, Instagram et X. Sous la plupart de ces publications, les commentaires laissés par les internautes montrent clairement qu’ils félicitent la Namibie pour cette prétendue décision.
Mais attention : si la Namibie a bien instauré de nouvelles règles rendant plus strict l’accès à son pays pour de nombreux ressortissants - y compris ceux provenant des Etats-Unis -, le gouvernement n'a jamais annoncé que 500 citoyens américains seraient expulsés.
Visas désormais exigés pour les touristes
Selon les données touristiques de la Namibie, plus de 25.500 ressortissants américains sont venus visiter la Namibie en 2023. Avant les récentes annonces, les détenteurs de passeports américains qui prévoyaient "de visiter la Namibie pour le tourisme ou des réunions d'affaires informelles pendant moins de 90 jours" étaient "exemptés de visas", précise une page de l'ambassade américaine en Namibie (archivée ici).
Mais la situation a récemment changé : "à partir du 1er avril 2025, le gouvernement namibien exigera des touristes américains qu'ils obtiennent un visa avant d'entrer dans le pays", a prévenu l'ambassade américaine dans un communiqué de presse (archivé ici). Les voyageurs américains venant en Namibie pour les études, le travail ou en volontariat ne verront eux "aucun changement" lors de leur admission dans le pays, précise l'ambassade, puisqu'ils devaient déjà justifier d'un visa.
Pour autant, cela ne signifie pas que des Américains déjà présents en Namibie seront expulsés, a fortiori s'ils y exploitaient des ressources minières, ce qui nécessitait même avant le récent changement de législation un visa de travail.
Le communiqué de l'ambassade américaine indique notamment que les voyageurs qui dépassent la durée de leur titre de séjour ou n'ont pas de visa d'entrée sur le territoire "risquent la détention, une arrestation et des amendes", mais il ne mentionne pas d’expulsion.
Expulsion d’Américains ? Une "fake news"
Une recherche par mot-clé avec les groupes de mots "Namibie-expulsion-américains" puis "Namibie-visa-expulsion" a permis de trouver d’innombrables articles de blog, publications et vidéos reprenant l'affirmation selon laquelle 500 américains allaient être expulsés de la Namibie, mais aucune annonce officielle de la part du gouvernement.
Le chargé des relations presse du ministère des affaires étrangère namibien, Alfredo Hengari, a confirmé à AFP Factuel que la présidente n’avait pas commenté publiquement les nouvelles exigences de la Namibie en matière de visa.
Interrogée spécifiquement sur des éventuelles expulsions de ressortissants américains, la porte-parole du ministère namibien de l’Intérieur, Margaret Kalo, a déclaré le 15 avril 2025 à AFP Factuel qu'elle n'était pas au courant "d'une telle décision".
Devant l’ampleur que prenait cette affirmation sur les réseaux sociaux, la présidence namibienne a publié le 15 avril 2025 un démenti sur X, qualifiant l’affirmation de "fake news" (archivé ici).
Fake news! pic.twitter.com/nkpqjc2Vva
— Namibian Presidency (@NamPresidency) April 15, 2025
L'ambassade des États-Unis n’a elle constaté aucune expulsion et a simplement indiqué dans un courriel à AFP Factuel le 17 avril 2025 que "la présidence namibienne (avait) déclaré qu'il s'agissait d'une fausse nouvelle".
Mesures de réciprocité
La Namibie a pris la "décision stratégique" courant 2024 de changer les règles d'entrée sur son territoire pour plusieurs pays, afin de "favoriser des relations diplomatiques justes et équilibrées", indiquait fin mai dans un communiqué le ministère de l'Intérieur.
La Namibie avait en effet "accordé un traitement de faveur ces dernières années" à plusieurs pays, en exemptant de visa leurs ressortissants sous certaines conditions. Malgré "ces efforts", "certaines nations n'ont pas fait preuve de réciprocité", soulignait le ministère, c'est pourquoi le gouvernement namibien "a jugé nécessaire de mettre en place une obligation de visa afin de garantir la parité et l'équité dans les interactions diplomatiques".
En conséquence, le parlement namibien a approuvé l’année dernière de nouvelles exigences en matière de visa pour 31 pays, dont les États-Unis, où la politique migratoire s'est encore durcie depuis le retour au pouvoir fin janvier de Donald Trump. L'Australie et la Nouvelle-Zélande ont ensuite été ajoutées à cette liste, la portant à 33 (archivé ici).

Depuis le 1er avril, les ressortissants de ces pays souhaitant visiter la Namibie en simples touristes doivent donc demander un visa avant d'arriver et s'acquitter de frais s'élevant à 1.600 dollars namibiens (environ 75 euros), indique ce document officiel.
Depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, AFP Factuel a déconstruit de nombreuses fausses informations liées aux migrations et aux visas, comme ici.