Cette vidéo ne montre pas le transport de chars russes en Ukraine et précède le conflit

Une vidéo censée montrer de nouveaux chars russes roulant en direction de l’Ukraine cumule près d’un million de vues sur Facebook depuis le 29 septembre. Il s'agit prétendument de "chars de dernière génération, les plus dangereux" et d'un prélude à l’exécution de la menace nucléaire brandie par Poutine. C'est faux, cette vidéo est antérieure à l’invasion russe en Ukraine ; elle a été filmée en 2019 par le gouvernement russe concernant le renforcement de son dispositif militaire dans une région de Sibérie occidentale.

La séquence d'un peu plus d'une minute montre d’imposants chars de combat convoyés à bord d'un train en mouvement, puis d'autres véhicules blindés roulant sur un chemin boueux en plein hiver . "La Russie vient d'envoyer des armes et des chars dernière génération les plus dangereux en Ukraine", croit savoir l’auteur d’une vidéo qui, depuis le 29 septembre, totalise à lui seul plus de 500.000 vues sur Facebook.

La même vidéo et le même message sont relayés par bon nombre de comptes Facebook pro-russes en Afrique de l'Ouest (1,2,3…).

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Capture d'écran d'une publication sur Facebook, réalisée le 3 octobre 2022

L’internaute affirme que le matériel militaire ainsi déployé "à la veille du discours du président Poutine", serait un avant-goût “des armes nucléaires” que Moscou a de nouveau menacé d'utiliser le 27 septembre.

Cette annonce a commencé à circuler quelques jours avant que le président russe Vladimir Poutine ne formalise à Moscou, l'annexion par la Russie de quatre régions du sud et de l'est de l'Ukraine le 30 septembre : celles de Donetsk, Lougansk, Zaporijjia et Kherson.

Moscou a répété qu'elle défendrait les territoires considérés comme russes s'ils étaient attaqués, "y compris avec les armes nucléaires stratégiques". Le plan d’annexion défendu par Poutine a été largement dénoncé par Kiev et ses alliés occidentaux et condamné par le chef de l’ONU.

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Mais la vidéo virale n’a rien à voir avec la guerre en cours en Ukraine, qui elle, a débuté le 24 février 2022.

Nous avons effectué une recherche d’image inversée avec l’outil InVID-WeVerify qui a permis d'isoler des fragments de la vidéo virale, et ainsi de retrouver la même séquence publiée le 16 octobre 2019 sur le compte YouTube du ministère russe de la Défense.

Selon la légende qui lui est associée, on y voit l’entrée du "premier lot des derniers systèmes de missiles antiaériens Buk-M3 dans le district militaire central pour renforcer la brigade de missiles anti-aériens de la 41e armée interarmes stationnée dans l'Altaï", une région reculée de Russie située à la frontière avec la Mongolie, la Chine et le Kazakhstan. Le District militaire central comprend l’Oural, la région de la Volga, ainsi que la partie occidentale de la Sibérie, notamment l’Altaï.

Traduit du russe, ce descriptif indique que les forces armées russes renforcent leur dispositif militaire sur le territoire national en se dotant du Buk-M3, un système de défense aérienne militaire à moyenne portée "qui surpasse considérablement ses prédécesseurs en termes de performance". Les premiers systèmes de défense antimissile Buk-M3 ont été livrés à l’armée russe en 2016, et comme l'indique le ministère, il ne s'agit ici que du premier lot destiné au District militaire central.

"Le rééquipement avec de nouveaux complexes augmentera d'un tiers les capacités de combat de la brigade pour protéger les unités terrestres et les installations importantes des attaques aériennes", précise encore le ministère de la Défense russe.

Il ne s’agit donc pas d’une nouvelle acquisition russe pour la guerre en Ukraine comme le mentionne le message viral ; le conflit russo-ukrainien ayant débuté à l’aube du 24 février 2022.

Le point sur la guerre en Ukraine

Sept mois après l’invasion russe en Ukraine, l'espoir de voir le conflit qui oppose les deux pays prendre fin prochainement semble s'amenuiser de jour en jour.

L'annexion des régions de Donetsk, Lougansk, Zaporijjia et Kherson annoncée par Poutine vendredi 30 septembre rend "beaucoup plus difficile, impossible, presque, la fin de la guerre", a déclaré le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, sur la chaîne de télévision espagnole RTVE.

L'Ukraine, qui a lancé début septembre une contre-offensive mettant en difficulté l'armée russe sur le terrain, a annoncé dimanche avoir repris la ville stratégique de Lyman, dans la région de Donetsk annexée par la Russie. Le même jour, la Cour constitutionnelle russe a jugé légaux les traités d'annexion des territoires ukrainiens signés par Vladimir Poutine.

Après Lyman, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a assuré samedi que son armée reprendra "dans la semaine à venir" d'autres villes de la région de Donetsk.

Le pape François a de son côté "supplié" M. Poutine d'"arrêter" la "spirale de violence et de mort" en Ukraine, tout en déplorant les annexions "contraires au droit international".

L’ONU a affirmé fin septembre que "chaque jour, en moyenne, cinq enfants sont blessés ou tués, et que quelque 14 millions de personnes, dont une majorité de femmes et d’enfants, ont dû fuir le conflit". L'institution dénonce les "répercussions mondiales (de cette guerre), provoquant une triple crise alimentaire, énergétique et financière".

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