Oui, cette photo a bien été prise à Nantes

La photo d'un policier maintenant au sol un homme, la main au niveau du cou, a été partagée des milliers de fois sur les réseaux sociaux depuis le 3 août. De nombreux internautes jugent suspecte la tenue du policier et estiment que le cliché a été pris à l'étranger. Mais il a bien été pris à Nantes samedi lors d'une manifestation visant à dénoncer les violences policières et en mémoire de Steve Maia Caniço.

"Cette scène paraît surréaliste mais elle s'est pourtant bien déroulée à Nantes" samedi 3 août, affirme un utilisateur de Facebook, dont la publication a été partagée plus de 4.300 fois en 19 heures.

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(capture d'écran facebook du 5 août 2019)

Sur les deux images en noir et blanc qui accompagnent la publication, un homme, pistolet et menottes à la ceinture, casque étiqueté "police" sur la tête, maintient au sol un autre homme.

"Une photo qui décrit à elle seule le régime en place", estime le compte Twitter du collectif militant "Nantes révoltée" en relayant l'une des deux images dans un tweet qui a généré 3.300 partages en 24 heures.

Dans les commentaires de ces publications, des dizaines d'internautes mettent en doute la véracité des clichés, les jugeant suspects, notamment à cause de la tenue du policier.

"Fake c'est une photo de policier espagnol", "c'est pas des uniformes français", affirment par exemple des internautes. 

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(captures d'écran facebook et twitter du 5 août 2019)

Des utilisateurs de Twitter ont également interrogé l'AFP sur la provenance de ces images (1,2,3,4).

Où a été prise cette photo ? 

Les photos sont signées du nom de la photographe "Bsaz", qui possède sa propre page Facebook, suivie par 22.000 personnes. Le cliché viral fait partie d'un album Facebook de 12 photos intitulé : "03 août 2019. Manifestation contre les violences policières suite à la marche pour Steve".

Dans cette vidéo Facebook, on retrouve le moment de l'arrestation, à partir d'1 minute et 12 secondes.

Le casque étiqueté "police", le sweat gris du policier, le pistolet à la ceinture, la fumée blanche et les rails de tramway... tous ces éléments concordent avec la photo virale.

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(capture d'écran facebook du 5 août 2019)

À 52 secondes, on distingue la devanture d'une chapellerie qui se retrouve, grâce à Google Street View, à Nantes non loin de rails de tramway.

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(capture d'écran facebook du 5 août 2019)

Contacté par l'AFP, le service d’information et de communication de la Police nationale (Sicop) confirme que cet homme au sol a été interpellé "à 17h41".

Que s'est-il passé ? 

Selon le Sicop, l'homme, âgé de 51 ans, "a été interpellé alors que, quelques minutes auparavant, il avait jeté une bouteille en verre grand format sur les forces de l’ordre".

"Il a été maintenu au sol le temps de son interpellation alors qu’il tentait de donner des coups de poing au visage du policier. Il a été transféré à l’hôpital car incommodé par les gaz lacrymogènes puis est revenu au commissariat à minuit où il a été placé en garde à vue", explique le Sicop.

"Il a reconnu le jet de bouteille, sa garde à vue a été levée et l’enquête se poursuit en préliminaire" pour "violences avec arme sur personne dépositaire de l’autorité publique", précise-t-on de même source.

Selon la Direction départementale de la sécurité publique (DDSP) de la Loire-Atlantique, l'homme est connu des services de police. "Il a été maintenu au sol par le policier de la Bac et non étranglé", a déclaré une porte-parole.

Le photographe de l'AFP Jean-François Monier décrit une scène d'une "confusion totale". "Il y avait un peu plus loin, un homme à terre qui était victime d'une insuffisance cardiaque et de l'autre côté (près des rails du tram) la Bac qui procédait à des arrestations", explique-t-il.

"Il y avait du gaz lacrymogène, des policiers qui demandaient aux manifestants d'évacuer les lieux pour permettre aux pompiers de passer, des manifestants qui alertaient les policiers sur la présence d'un blessé et des jets de projectiles", détaille-t-il.

L'auteur de la vidéo Facebook a quant à lui expliqué à nos confrères de CheckNews que l'arrestation a eu lieu au moment où l'homme est "allé dire (aux policiers) qu’il y avait quelqu’un au sol, non loin de là, sous une couverture de survie".

Une personne sous une couverture de survie est visible sur la photo AFP ci-dessous, prise à quelques dizaines de mètres du lieu de l'arrestation.

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Une autre vidéo virale montrant l'homme arrêté

Une autre vidéo partagée elle aussi des milliers de fois sur Facebook et Twitter depuis ce week-end (1,2,3,4) montre un homme à terre, cherchant visiblement son souffle, adossé à un camion de la police et entouré par des policiers.

"Il s’agit du même homme, les policiers attendent l’arrivée des sapeurs pompiers. Il a fait une crise liée à l’incommodation des gaz lacrymogènes", a affirmé le Sicop.

"Le certificat médical mentionne 0 jour d’ITT", affirme cette même source, qui estime que "c’est une interpellation qui s’est bien passée".

Libération s'est entretenu par téléphone mardi avec l'homme interpellé. Bruno Kaïk, traducteur et interprète qui vit à La Rochelle selon le journal, dénonce une "réaction (...) complètement disproportionné" de la part des policiers.

L'homme de 51 ans affirme que son hospitalisation a été causée par des "maltraitances policières" et non par "une crise liée à l’incommodation des gaz lacrymogènes", comme l'avance le Sicop. Il annonce aussi au quotidien son intention de porter plainte.

Lors des heurts qui ont éclaté samedi après-midi dans le centre de Nantes entre les forces de l'ordre et des manifestants venus dénoncer les violences policières et la mort de Steve Maia Caniço, quarante-deux personnes ont été interpellées, a indiqué la préfecture de Loire-Atlantique, comme nous l'écrivions dans cette dépêche AFP.

Edit : mis à jour le 07/08 à 10h30 avec témoignage de l'homme arrêté dans Libération 
et date de la première capture d'écran modifiée

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