
Non, le drapeau palestinien n’a pas été affiché sur la tour du Caire, en Egypte
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- Publié le 04 juin 2021 à 18:49
- Lecture : 4 min
- Traduction et adaptation : Sadia MANDJO
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La tour du Caire recouverte de bandes verticales verte, blanche et noire, sous un triangle rouge retourné: cette image, montrant l'édifice emblématique de la capitale égyptienne arborant les couleurs du drapeau palestinien, a largement circulé sur les réseaux sociaux depuis le 18 mai.
Selon les internautes, le monument égyptien, dont le sommet symbolise une fleur de lotus, aurait ainsi affiché son soutien au peuple palestinien, après les combats qui ont opposé durant 11 jours l’Etat hébreu et des groupes armés dans la bande de Gaza.
"Vous n’avez pas besoin d’être Palestinien pour aimer la Palestine", assure l'auteur de l'une de ces publications. "Vive l’Egypte. Vive la Palestine", s’enthousiasme un deuxième internaute, tandis qu'un troisième évoque son "soutien indéfectible à Gaza".
Ces messages ont été largement partagés sur Facebook et sur Twitter, en français (1, 2, 3, 4, 5), mais aussi en anglais, en arabe, en portugais et espagnol.

Une photo datant de 2010 mais retouchée
Ces messages, cependant, sont trompeurs. Une recherche d’image inversée permet de retrouver cette même photo -- sans les couleurs palestiniennes -- dans des publications de 2015, de 2016 et de 2019. Soit bien avant le conflit qui a opposé durant 11 jours Israéliens et Palestiniens.
La première apparition de cette image remonte en réalité à 2010: il s’agit d’un cliché publié sur le site Wikimedia Commons par Ahmed Santos. Sur cette photo, là encore, les couleurs palestiniennes sont invisibles: la tour est décorée de points lumineux violets, et non de bandes verte, blanche et noire.
Malgré les différences de couleurs, ces images sont bien les mêmes, comme le montrent les indices visuels ci-dessous: le croissant de lune, en haut à droite, est ainsi le même dans les deux cas; et les arbres plongés dans l’obscurité ont exactement la même forme.


Image retouchée
L’AFP a comparé les deux photos à l’aide de l’outil d’analyse EnVisu4, qui sera disponible sur la prochaine version du logiciel Invid-WeVerify. Ce logiciel, co-développé par l’AFP, permet de voir si une image a été modifiée. Les résultats, là encore, prouvent que la photo a subi des modifications.
L’utilisation du filtre "GHOST" sur l’image qui nous intéresse révèle plusieurs signes de compression sur toute l’étendue du drapeau, en particulier dans la zone où apparaît le triangle rouge, sur la partie haute de la tour. Ces compressions prouvent que l’image a été enregistrée à plusieurs reprises.

En utilisant dans un deuxième temps le filtre "DCT" sur les deux images, on remarque que le logiciel ne détecte aucune anomalie sur la photo originale. Ce n’est pas le cas de la photo où l’on voit la tour du Caire arborant le drapeau palestinien, qui présente plusieurs points de modifications.

L’Egypte médiateur entre le Hamas et Israël
Les violences entre Israël et les groupes armés palestiniens ont fait près de 250 morts côté palestinien, dont 66 enfants, tués par des tirs israéliens dans la bande de Gaza selon les autorités. Le bilan côté israelien est de 12 morts, parmi lesquels un enfant, une adolescente et un soldat, d’après la police.
Le conflit a éclaté avec le tir par le Hamas de roquettes vers Israël, en solidarité avec des Palestiniens blessés, lors d'affrontements avec la police israélienne sur l'esplanade des Mosquées, à Jérusalem-Est. A l'origine de ces heurts, la menace d'expulsion de familles palestiniennes au profit de colons israéliens.
Durant les 11 jours du conflit, l’Egypte s’est posée en médiatrice, renouant avec son rôle régional historique dans le conflit qui oppose les deux partis. C’est sous sa houlette qu’un cessez-le-feu a été négocié, avant d’entrer en vigueur le 21 mai.
Depuis la signature du cessez-le-feu, l'Egypte et le Qatar ont chacun promis 500 millions de dollars (environ 410 millions d'euros) pour la reconstruction de la Bande de Gaza. Ce territoire, où sont concentrés près de deux millions d'habitants, vit sous blocus israélien depuis près de 15 ans.