
Les HLM ne pourront pas être rachetées par des “fonds spéculatifs” ? C’est faux
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- Publié le 06 juin 2018 à 18:40
- Lecture : 3 min
- Par : Rémi BANET, Guillaume DAUDIN
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Le député de Haute-Garonne, interrogé par le journaliste Nicolas Demorand sur la possibilité que des fonds de pension puissent à l’avenir acheter des "ensembles d’immeubles" pour les "revendre à la découpe", s’est montré catégorique : "Ca a été une fausse information qui a circulé sur ces fonds de pension (...). On parle de sociétés HLM créées expressément pour, justement, la vente de ces logements, mais il ne s'agit pas de fonds spéculatifs, de fonds financiers", a assuré l’élu LREM, après l'adoption dimanche de l'article 29 du volet logement du projet de loi Elan (Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique).
Dans cet article sont en effet créées des "Sociétés de ventes d’habitations à loyer modéré" évoquées par M. Nogal. Mais des alinéas de ce même article 29 ouvrent par ailleurs la possibilité pour les "personnes morales de droit privé" d'acquérir des logements sociaux.
Si le texte reste en l'état après son adoption finale à l'Assemblée nationale et son examen au Sénat, les acteurs privés pourront acquérir sous condition certains logements sociaux, ceux répondant aux "plafonds de ressources des prêts locatifs sociaux (PLS)" qui ont été "construits ou acquis par des organismes HLM depuis plus de quinze ans".
Dans le cas d'achats de logements sociaux à l'unité, ils ne seront pas prioritaires pour un logement vacant (les personnes physiques restent prioritaires) et devront respecter le bail en cours pour un logement occupé, mais ils pourront désormais acquérir des logements sociaux vacants ou occupés "par bloc", c'est-à-dire lorsque cinq logements ou plus seront mis en vente de manière groupée.
C'est ce qui est écrit à l'article 29 alinéa 72 (p. 110), un article adopté dimanche par 62 voix contre 17.

La possibilité faite aux acteurs privés d'acquérir des logements sociaux "par bloc" a d’ailleurs suscité de vives critiques dans l’hémicycle, comme l’expliquait l'AFP dans cette dépêche publiée fin mai. Cela créera un "open bar" pour certains investisseurs, s’est indignée la cheffe de file socialiste Valérie Rabault, tandis que Jean-Luc Mélenchon, chef de file LFI, a dit craindre "une spéculation terrible".
Le PS avait proposé d’interdire la vente en bloc, sauf entre bailleurs sociaux, en vain. Deux amendements visant à "interdire, dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, la vente de logements sociaux à des personnes morales de droit privé" et à "éviter les phénomènes de spéculation lors de la vente des logements en PLS [prêt locatif social, NDLR]" ont été rejetés dimanche.
La rapporteure LREM sur ce volet du projet de loi, la députée de Gironde Christelle Dubos, s’est voulue rassurante sur la spéculation qui pourrait naître de "la vente en bloc de logements": "Je n’ignore pas les risques spécifiques existant pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville, dont nous avons déjà parlé en commission et en séance ; mais je fais confiance aux maires, dont l’avis sera sollicité en amont de l’autorisation de vente, ainsi qu’aux préfets, en raison du rôle qu’ils jouent dans la gestion des conventions d’utilité sociale", a-t-elle argumenté pendant la discussion du texte à l’Assemblée dimanche.
Contacté par l'AFP, le député Mickaël Nogal a reconnu que "oui", évoquer dans le texte de loi des "personnes morales de droit privé englobe l'ensemble des acteurs du secteur privé", y compris donc les fonds de pension, contrairement à ce qu'il indiquait sur France Inter.
Mais le député est convaincu que des "garde-fous" suffisants ont été intégrés à cette loi en cours d'adoption pour que dans les faits, ces achats de logements sociaux ne soient "pas réalisés par des personnes mal intentionnées". "Un fonds spéculatif, s'il a de l'argent ou s'il veut trouver des subterfuges fiscaux, il va aller trouver des bureaux sur lesquels investir plutôt que d'acheter des logements sociaux (...). Tout est cadré", estime-t-il.