
Non, prendre sa température avec un thermomètre infrarouge n'endommage pas la glande pinéale
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- Publié le 23 juillet 2020 à 16:55
- Mis à jour le 02 septembre 2020 à 16:27
- Lecture : 3 min
- Par : Marin LEFEVRE
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Toutes les publications dénichées par l'AFP commencent de la même manière: elles prétendent alerter au sujet des dangers des thermomètres infrarouges en rapportant "le témoignage d'une infirmière australienne", "très parlant".

Selon ce "témoignage", la prise de température en utilisant un thermomètre infrarouge mettrait en danger la glande pinéale, située dans le cerveau.
Ces publications (1, 2, 3, 4, 5, 6) ont été partagées près de 6.000 fois sur Facebook depuis fin juin.
C'est faux : l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) détaille à l'AFP le 23 juillet que "l'individu testé n'est aucunement soumis à une exposition à un rayonnement infrarouge lors de la prise de température".
Le thermomètre capte en réalité les spectres infrarouges émis par le corps humain via une lentille sur un capteur. Selon les longueurs d'ondes des rayonnements reçus, il affiche une température plus ou moins élevée.
Par ailleurs, même si des rayons infrarouges étaient dirigés vers cette glande, elle est située trop profondément dans le cerveau pour qu'ils l'atteignent, selon Gabrielle Girardeau, chercheuse en neurosciences à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) jointe par l'AFP le 22 juillet.
"La lumière a une très faible capacité de pénétration de la barrière constituée par le crâne, même si les longueurs d'ondes infrarouges pénètrent plus facilement", détaille-t-elle.
"Il faudrait traverser complètement la boîte crânienne pour atteindre cette petite glande qui est située au fond du cerveau", abonde Mireille Rossel, enseignante chercheuse en neurosciences à l'École Pratique des Hautes Études (EPHE), dans un échange téléphonique avec l'AFP le 23 juillet.
La glande pinéale, ou épiphyse, est une petite glande d'environ 8 millimètres "qui sécrète la mélatonine, une hormone impliquée dans les rythmes circadiens, c'est-à-dire l'alternance des phases de sommmeil et d'éveil [jour-nuit]", explique Gabrielle Girardeau.
Maude Beaudoin-Gobert, docteure en neurosciences affiliée à l'université Claude Benard Lyon 1 précise à l'AFP le 23 juillet que ce sont les "cellules de la rétine [qui] détectent la lumière et transmettent les informations à un certain nombre de relais dans le cerveau avant d'arriver à la glande pinéale". Ce qui permet d'activer la sécrétion de mélatonine pendant la nuit.

"Je pense que la genèse de cette croyance de l'effet du thermomètre sur la glande pinéale vient du fait que chez les reptiles et les oiseaux cette glande est effectivement juste sous le crâne et contient des cellules photosensibles (et donc sensibles à la lumière du spectre visible et infrarouge)", suppute la chercheuse. Ce qui n'est pas le cas pour les mammifères.
Certains de ces thermomètres infrarouges utilisent cependant un pointeur laser, une petite lumière qui n'est pas composée de rayonnement infrarouge et qui "sert à orienter le thermomètre vers la partie du corps dont on souhaite mesurer la température", ajoute l'ANSM. Mais sa puissance "est faible et des mises en garde sont présentes indiquant de ne pas regarder le faisceau".
L'agence précise également n'avoir "reçu aucun signalement sur des problèmes liés à l'utilisation de ce type de thermomètre" et qu'il "n'y a pas de fondement sur des risques liés à leur utilisation".