Nicolas Bay, vice-président du FN, mercredi 15 février 2018 sur France Inter (DR/France Inter/Twitter/AFP)

Les approximations de Nicolas Bay (FN) sur les chiffres du chômage

  • Cet article date de plus d'un an
  • Publié le 15 février 2018 à 16:30
  • Lecture : 4 min
  • Par : Guillaume DAUDIN
Nicolas Bay, vice-président du FN, a affirmé mercredi sur France Inter qu'il y avait "80.000 chômeurs de plus" depuis le début du quinquennat, un chiffre au mieux très approximatif, sinon faux, et ce quelle que soit la source.

Interrogé sur les chiffres provisoires de l'Insee annoncés le matin même, un taux de chômage en recul à 8,9% en France (outre-mer compris) au quatrième trimestre 2017, M. Bay a répondu : "Je rappellerai d'abord que le chômage a augmenté depuis le début du quinquennat avec 80.000 chômeurs de plus. Vous avez raison de parler des chômeurs de catégorie A en métropole mais ça ne doit pas nous amener à oublier tous les autres chômeurs dans les autres catégories et y compris en outre-mer."

Voici comment le compte twitter du Front national résume cette déclaration:

"A ce stade, il n'y a pas de baisse, il y a un ralentissement de la hausse" et "au total six millions de chômeurs en France", a aussi dit ce haut responsable du parti d'extrême droite.

Les chiffres de l'Insee dévoilés le matin même sont basés sur la définition du chômage au sens du Bureau International du Travail (BIT), et sont à leur plus bas niveau en pourcentage depuis 2009: selon cette définition du chômage, l'affirmation de Nicolas Bay est fausse.

Mais ce haut dirigeant FN se réfère lui aux chiffres issus des statistiques de Pôle emploi et de la Dares. Ils comptabilisent le nombre de demandeurs d'emploi, une notion bien plus large que celle de chômeurs, car elle comprend nombre de personnes ayant une activité, parfois réduite, mais cherchant tout de même un emploi.

Selon ces chiffres , les chômeurs au sens strict, ceux comptabilisés en catégorie A, soit des "personnes sans emploi, tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi, à la recherche d'un emploi quel que soit le type de contrat (CDI,CDD, à temps plein, à temps partiel, temporaire ou saisonnier)) sont passés dans toute la France, outre-mer compris, de 3,75 millions fin mai 2017, deux semaines après l'investiture d'Emmanuel Macron, à 3,71 millions en décembre, dernier mois de statistiques disponible.

Si l'on compte toutes les catégories de demandeurs d'emploi, non seulement les chômeurs de catégorie A mais aussi les catégories B, C, D et E (des salariés qui continuent à chercher un emploi, des personnes en formation, etc.) et que l'on prend en compte la France métropolitaine mais aussi l'outre-mer, soit le chiffre auquel semble faire référence M. Bay, ce chiffre est passé de 6,613 millions en mai 2017 à 6,614 millions en décembre sur la France entière soit une hausse de 1.100 demandeurs d'emploi (+0,0015%) qui n'est pas celle de 80.000 qu'il a évoquée.

Enfin, si l'on compte les seules catégories A, B et C, qui sont parfois regroupées, alors le nombre de chômeurs est passé sur la France entière de 5,864 millions en mai 2017 à 5,92 millions en décembre, soit une augmentation de 56.000 chômeurs. 

Dans aucune de ces quatre configurations, le nombre de chômeurs n'a augmenté de 80.000 depuis le début du quinquennat.

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Un demandeur d'emploi, le 28 décembre 2017 à Lille (AFP / Philippe Huguen)

Reste une possibilité, relevée par Jean-Philippe Chognot, spécialiste à l'AFP des questions d'emploi: "Nicolas Bay doit se placer sur le champ des catégories A+B+C, et doit compter à partir de fin avril, au lieu de fin mai. Si on se met sur ce champ, il y a une hausse de 77.300 demandeurs d'emploi en métropole (5.612.300 fin décembre - 5.535.000 fin avril)et de 84.500 demandeurs d'emploi en France entière (5.920.600 fin décembre - 5.836.100 fin avril)." Ce qui correspond peu ou prou aux chiffres du responsable FN.

Ce journaliste au service social de l'AFP a toutefois "deux réserves à l'égard de ce raisonnement: premièrement, les personnes en catégories B et C ne sont pas des chômeurs, car elles ont travaillé au cours du mois, jusqu'à 78 heures pour les uns, plus de 78 heures pour les autres. Ce sont des demandeurs d'emploi. Donc il serait plus juste de dire que depuis fin avril, il y a eu 77.300 ou 84.500 demandeurs d'emploi en plusDeuxièmement, c'est bizarre de comparer fin décembre à fin avril, car Emmanuel Macron est devenu président à la mi-mai."

Jean-Philippe Chognot résume: "on ne peut pas dire, comme le fait M. Bay, que le chômage a augmenté depuis le début du quinquennat avec 80.000 chômeurs de plus. En revanche, on peut dire que la baisse du chômage constatée par Pôle emploi depuis le début du quinquennat Macron est à nuancer, car si l'on compte tous les demandeurs d'emploi, y compris ceux qui sont restés inscrits à Pôle emploi tout en exerçant une activité, les chiffres restent en hausse."

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