Extrait de la vidéo, partagée par la page Facebook EcoWatch (WWF Suisse / AFP)

Non, des manchots ne vivent pas sur une île de plastique, c'était un poisson d'avril

  • Cet article date de plus d'un an
  • Publié le 27 avril 2018 à 11:30
  • Mis à jour le 27 avril 2018 à 12:11
  • Lecture : 3 min
  • Par : Jean-Gabriel FERNANDEZ
Une vidéo dénonçant l'effet néfaste des déchets plastiques sur l'environnement des manchots est devenue virale, réunissant plus de 80 000 partages. Il s'agit pourtant d'un poisson d'avril ; les images sont truquées et ont été mises au point par l'ONG écologiste WWF.

De nombreux internautes ont été horrifiés de découvrir une vidéo, rapidement devenue virale, montrant une colonie de manchots vivant sur une île composée de déchets plastiques. Il s'agit d'une vidéo truquée. Postée par la branche suisse du WWF (World Wide Fund for Nature), une ONG luttant pour la protection de l'environnement et de la biodiversité, cette vidéo de manchots est un montage élaboré visant à faire un poisson d'avril pour dénoncer la pollution des océans.

Alors que la vidéo originelle n'a été vue que 40 000 fois, elle est devenue virale sur les réseaux sociaux, dans des publications où le contexte a été modifié. Sur Facebook, la vidéo a été visionnée plus de 3 millions de fois et partagée à plus de 80 000 reprises. La vidéo a notamment été relayée par trois pages Facebook très populaires, le magazine Yachting World et les écologistes EcoWatch et IBanPastic, ainsi que des dizaines d'utilisateurs. Une branche asiatique de l'Organisation des Nations Unies a aussi relayé une image issue de la vidéo sans se rendre compte qu'il s'agissait d'un poisson d'avril.

Une vidéo sortie de son contexte par des partages incontrôlés

Publiée sur Youtube, la vidéo semble tout à fait sérieuse à première vue. Le WWF écrit en description "Incroyable: pour la première fois, des chercheurs ont découvert des manchots qui nichent sur un amas de déchets plastiques", et lance même le hashtag #penguinsonplastic pour dénoncer le phénomène. Il faut cliquer sur un lien dans la description pour arriver sur le site de l'organisation, où le canular est révélé. Pourtant, de nombreux internautes relaient la publication sans lire l'explication de l'ONG, et la vidéo se répand.

"Le jour même, en postant sur les mêmes pages, on a informé qu'il s'agissait d'un poisson d'avril. Pour nous, c'était clair, il n'y avait pas de volonté de manipulation", explique le service de presse du WWF. L'organisation a tenté de prendre des mesures contre la propagation de la vidéo hors de son contexte. Elle a notamment supprimé la publication initiale sur Facebook et publié des tweets pour rappeler aux internautes que la vidéo est truquée, mais ceux-ci ont été peu partagés.

L'année dernière, l'organisation avait réalisé un poisson d'avril qui ne laissait pas planer le doute, dénonçant la chasse aux licornes tout en attirant l'attention sur le véritable problème des rhinocéros d'Afrique, chassés pour leurs cornes. Fidèles à cette tradition de poisson d'avril visant à sensibiliser la population à de véritables causes, le WWF a cherché à alerter cette année sur la pollution des océans. "L'intention était d'attirer l'attention sur les continents de plastique qui polluent les océans et qui sont un fléau pour les populations marines", explique l'organisation.

C'est probablement la raison qui a permis à ce canular de prendre une telle ampleur sur les réseaux sociaux : le problème dénoncé est bien réel, ce qui rend le canular plausible. Il n'existe pas, à notre connaissance, de colonies de manchots vivant sur une pile de déchets, mais il y a bien des masses de plastique flottant sur les océans. La plus grande d'entre elles, entre Hawaï et la Californie, couvre une zone de 1,6 millions de km², soit trois fois la taille de la France. Ce véritable continent artificiel est composé de "milliards de morceaux" de plastique et 80 000 tonnes de déchets, selon une étude publiée dans la revue Scientific Reports. Des millions de tonnes de plastique, principalement des morceaux d'une taille inférieure à 5 cm, se retrouvent chaque année dans les océans, mettant en danger les espèces marines et la biodiversité.

Note : Coquille corrigée.

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