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Les fausses bourses d’études au Canada, tout un art sur Facebook
- Cet article date de plus d'un an
- Publié le 02 octobre 2019 à 10:50
- Lecture : 4 min
- Par : Louis BAUDOIN-LAARMAN
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"Bourse Canada", "Bourse d’Études Canadiennes de l’Université Laval", "Immigration Bourse d’Etude Canada"... Autant de noms de pages Facebook qui prétendent aider des étudiants à postuler pour des bourses au Canada.
Malheureusement pour ceux qui y croient, elles n’existent que pour délester les aspirants boursiers de faux frais de dossiers liés à ces bourses imaginaires. Si certaines de ces pages ne dépassent pas les cent "j’aime", d’autres, comme "Bourse d’étude Canada", sont suivies par plus de 10.000 utilisateurs Facebook.
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Ces pages Facebook promettent jusqu’à plusieurs milliers de dollars à ceux qui enverront leur dossiers, moyennant quelques dollars de frais administratifs. Or, les adresses mail fournies pour l’envoi des dossiers sont invariablement affiliées à des serveurs Gmail, Aol, Yahoo ou autre, au lieu des adresses propres aux établissements cités, un premier indice d'un possible arnaque.
Les numéros de téléphones associés aux pages Facebook, eux, sont invariablement hors service ou connectés à des fax, a constaté l’AFP.
Sur une des pages, "Bourse D’Etude Canadienne", on peut lire les commentaires des internautes piégés : "Escrocs", écrit l’utilisateur Firmin Niampa de Ouagadougou, au Mali. "Je vais vous dénoncer", écrit un autre.
En effet, ces pages ne sont reconnues par aucune institution d’enseignement supérieur au Canada. Une d’entre elles, "Bourse d’Études Canadiennes de l’Université Laval", semble presque légitime, avec le logo de l’université et les photos d’étudiants souriants. Sauf que la page n’a rien à voir avec cette université située à Québec, et les photos ont toutes été volées sur les sites d’autres universités, comme le montre une recherche d’image avancée.
"Je vous confirme que cette page est une fraude", a écrit dans un courriel à l’AFP Andrée-Anne Stewart, porte-parole de l’Université Laval, l’une des plus ciblées par les arnaqueurs.
Elle ajoute que l’université Laval n’offre aucune bourse par l’intermédiaire de Facebook, et que la seule manière d’en obtenir une est de consulter le site internet www.ulaval.ca, ou d’être en contact direct avec l’un des responsables des études. "Ceux-ci ont une adresse courriel se terminant par ulaval.ca", précise-elle.
Un phénomène répandu
Selon Mme Stewart, ce type de fraude est très fréquent depuis quelques années. Entre mars 2017 et juin 2019, l’université a reçu 2,634 signalements de fraudes de ce genre, qui provenaient de 61 pays.
Afin de lutter contre ce fléau, l’Université Laval publie maintenant des règles de vigilance à adopter pour les étudiants étrangers. On recommande notamment aux étudiants d’éviter toute correspondance avec des adresses courriels Yahoo, Gmail, Hotmail ou autre, et de signaler toute fraude de ce genre, afin que les comptes Facebook puissent être désactivés.
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"Le défi est grand car dans la plupart des cas, (ces arnaques) proviennent de l’étranger. Nous avons prévenu les autorités compétentes, publié de l’information sur notre site, et exprimé nos préoccupations avec le personnel des ambassades (des pays concernés)", a expliqué à l’AFP Richard Levin, directeur exécutif aux admissions de l’Université de Toronto.
Cette université de l’Ontario, une des plus réputées au Canada, est également la cible de nombreuses escroqueries aux bourses. Une page Facebook prétend par exemple qu’un partenariat entre l’Organisation internationale pour les migrations et l’Université de Toronto prévoit la création de 1.617 bourses d’études.
"Nous avons vu plusieurs cas de fraudes qui impliquent les bourses internationales, des individus sans scrupules qui prétendent avoir un lien avec l’université", a déclaré M. Levin à ce sujet.
Qu’arrive t-il si l’on mord à l’hameçon?
Afin de comprendre comment ces pages monétisent les fausses annonces pour les bourses étudiantes au Canada, AFP Factuel a envoyé un message à l’email donné sur une de ces pages, universitelaval3@gmail.com, en se faisant passer pour un étudiant français à la recherche d’une bourse au Canada.
Quelques jours plus tard, un courriel répond qu’il nous faut monter un dossier avec divers documents habituels pour ce genre de démarche (certificat de scolarité, passeport, etc..), ainsi qu’une preuve du versement des frais de candidature. Ceux-ci s’élèvent à 105 dollars, "soit 61.320 CFA", précise le courriel, et doivent être transférés par le service Money Gram, "à l’adresse de notre représentant qui se trouve en L’Afrique de l’ouest", lequel semble en effet être basé dans la ville de Parakou, au Bénin.
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Les postulants sont également priés de remplir un formulaire estampillé du logo de l'Université Laval, bien qu’il n’existe pas officiellement, a confirmé à l’AFP Mme Stewart après l’avoir vu. Le reste de la démarche est tout aussi faux, a-elle ajouté.
Toutes les pages citées dans cet article sont fausses et ne peuvent dispenser de bourses d’étude au Canada. Comme l’ont rapporté à l’AFP les représentants de l’Université Laval et de l’Université de Toronto, les universités ne passent pas par des pages Facebook pour l’octroi de bourses.