RDC: de vieilles images resurgissent pour démontrer que l’armée a découvert de munitions dans son offensive contre les rebelles
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- Publié le 18 novembre 2019 à 16:55
- Lecture : 4 min
- Par : Ange KASONGO
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L’annonce de cette découverte de plus de 300 tonnes de munitions a notamment été relayée dans cette publication Facebook, partagée plus de 1.100 fois, depuis le 10 novembre. Elle a également récolté des centaines de partages dans d'autres publications sur le réseau social (1, 2, 3).
“LA GUERRE À L’EST EST EN TRAIN DE CHANGER, À CAUSE DE FATSHI BÉTON !! Plus de 300 tonnes de munitions du M23 et de fameux rwandais banyamulenges ont été découvertes à Chanzu”, peut-on lire dans ces publications.
Quelques médias en ligne comme Afriwave ont également repris les images et les informations de cette publication.
Le M23 (Mouvement du 23 mars), à qui appartiendraient les munitions et armes lourdes prétendument découvertes récemment, est une survivance des rébellions tutsis au Congo soutenue par le Rwanda. Mais ce groupe rebelle a été defait militairement par l'armée congolaise avec l'appui de l'ONU en 2013. Politiquement, un accord a été conclu entre le gouvernement congolais et le M23 pour leur transformation en parti politique.
En relayant la publication Facebook erronée, des internautes ont salué les opérations d’"envergure” annoncées par l’armée contre les milices actives dans le Nord-Kivu depuis fin octobre, ainsi que la politique du président Félix Tshisekedi.
Dans un communiqué daté du 10 novembre, dont l’AFP a obtenu copie, l'armée congolaise a déclaré vouloir "éradiquer de manière définitive les groupes armés terroristes actifs dans l'est de la RDC".
"Petit à petit nous comprenons qu'il y a un vrai Congolais au sommet de l'Etat, mais dans tout ça soutenons notre propre frère, père, le président Fatshi n'endurcit pas vos cœurs mais plutôt soyons unis tous pour développer notre grand Congo et bas la haine tribale”, écrit notamment un internaute en commentaire de la publication.
Mais l’armée n’a pas communiqué dernièrement sur la découverte de munitions dans l’est du pays.
Aucune communication officielle de l’armée
Contacté par l’AFP, le major Guillaume Ndjike, l’un des porte-parole de l’armée congolaise dans le Nord-Kivu a déclaré : "Nous n’aimons pas donner de valeur aux rumeurs. Dès lors que nous n’avons pas communiqué officiellement sur un événement, considérez toute affirmation comme une rumeur".
L’armée a bien découvert des munitions de rebelles, mais en 2013. Une recherche sur Google et Facebook, permet notamment de trouver un article datant du 6 novembre 2013, publié par Okapi, la radio onusienne basée en RDC.
"Nous avons découvert des caches d’armes à Chanzu que nous avons évaluées à plus de 300 tonnes de munitions. Nous avons découvert des armes qui ne sont jamais arrivées dans les dépôts d’armements des FARDC. Des armes lourdes qui tirent à 22 km ou 30 km et qui pilonnaient Bunagana", déclarait à l’époque l’ancien gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku, cité dans cet article.
Nous avons tenté plusieurs fois depuis le 15 novembre de joindre M. Paluku au téléphone, sans succès.
Alors d’où proviennent ces photos ?
Une recherche d’image inversée permet par ailleurs de trouver les même images que celles circulant ces jours-ci sur les réseaux sociaux, dans un article du site Great lakes post, publié le 6 novembre 2013. Les crédits photos sont signés "julienpaluku.com", le site internet du gouverneur de l'époque. L'AFP n'a pas pu vérifier la véracité de ces crédits photos.
"Ces images datent de 2013", a toutefois brièvement confirmé sur la messagerie WhatsApp, le lieutenant-colonel Olivier Amuli, porte-parole de la 34e région militaire et de l'opération "pomme orange" contre les rebelles du M23, à l'époque où l'armée congolaise avait fait la découverte des munitions et des armes lourdes.
Ces photos semblent avoir été prises le même jour de novembre 2013 que la photo ci-dessous, publiée le 7 novembre 2013 par un internaute sur Twitter. On y retrouve les mêmes individus, portant les mêmes vêtements.
Sur ces photos de 2013, Julien Paluku (encerclé en rouge dans les photos ci-dessous) est entouré de deux anciens officiers de l’armée, Mamadou Ndala (encerclé en bleu) et le Général Lucien Bahuma (en mauve).
Or, les deux officiers sont décédés en 2014, comme le fait justement remarquer un internaute en commentaire de la publication erronée : “Menteur ! Je ne savais que Bahuma, Mamadou et autres ont été ressuscités par Fatshi (Félix Tshisekedi, ndlr), il a des pouvoirs mystiques ? Qu'il ressuscite aussi mon père”.