Attention aux affirmations trompeuses d'une députée européenne sur la vaccination anti-Covid

Dans un extrait vidéo partagé plus de 30.000 fois en 48 heures, la députée européenne Christine Anderson affirme que les vaccins contre le Covid-19 n'ont pas été correctement testés avant leur mise sur le marché et qu'il n'existe pas de preuves scientifiques que les bénéfices induits par ces injections sont supérieurs aux risques d'effets indésirables associés. Mais ces allégations sont fausses ou trompeuses, selon les experts interrogés par l'AFP, qui rappellent que la vaccination reste à ce jour le moyen le plus efficace de se prémunir contre les formes graves de la maladie.

"La députée européenne Christine Anderson balance tout", titre cette vidéo qui montre un extrait de la prise de parole en anglais de cette femme politique allemande.

Membre du parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD), Christine Anderson a été élue députée européenne en 2019 et a pris position à plusieurs reprises contre la vaccination anti-Covid ces derniers mois.

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Capture d'écran prise le 02/11/2021 sur Facebook

Ces images sont rapidement devenues virales en France, cumulant plus de 30.000 partages en 48 heures sur Facebook et suscitant des centaines de commentaires de soutiens et de félicitations à la députée.

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Capture d'écran prise le 02/11/2021 sur Facebook
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Capture d'écran prise le 02/11/2021 sur Facebook

 

 

L'extrait viral a également été repris sur le site lemediaen442, ou les plateformes Youtube ou Odysee.

L'intervention de la députée a aussi été vue plus de 22.000 fois en anglais sur Twitter, et été relayée dans plusieurs pays, comme aux Etats-Unis, au Canada ou aux Pays-Bas.

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Capture d'écran prise sur Twitter le 02/11/2021

Pourtant, de nombreuses allégations citées par la députée au cours de son intervention sont fausses ou infondées, ont expliqué des experts à l'AFP.

La vaccination n'est pas efficace car elle n'empêche pas la transmission du virus : TROMPEUR

La vaccination "ne vous immunise pas, vous pouvez toujours contracter le virus et vous pouvez toujours infecter des gens. La seule chose que ce vaccin fait à coup sûr, c'est de déverser des milliards et des milliards de dollars dans les poches des groupes pharmaceutiques", commence par expliquer Christine Anderson.

Cet argument est fréquemment mis en avant sur les réseaux sociaux pour affirmer qu'il n'y aurait ainsi pas d'avantage à se faire vacciner contre le Covid-19. Mais le fait que des porteurs sains puissent encore transmettre le virus ne remet pas en cause l'intérêt de la vaccination, ont expliqué des experts à l'AFP dans cet article consacré à ce sujet.

Les différents vaccins qui sont développés pour lutter contre des maladies peuvent en effet procurer deux types d'immunité. Dans le cadre d'une immunité dite "stérilisante", la réponse immunitaire engendrée par le vaccin va éliminer entièrement le virus de l'organisme. C'est le cas du vaccin contre la variole, qui a permis l'éradication de la maladie de la surface de la terre en 1980.

Si l'immunité stérilisante reste l'objectif ultime de la recherche vaccinale, de nombreux vaccins utilisés aujourd'hui n'induisent, comme ceux contre le Covid-19, qu'une immunité dite "effective". Ils sont pourtant très efficaces.

"Le virus [du Covid] arrive dans le nez et devient dangereux dans les poumons. Or, ce que prévient le vaccin c’est la descente dans le système respiratoire jusqu'aux poumons, c’est pour ça qu’on est à presque 95% d’efficacité sur les formes graves" de la maladie, a expliqué en août à l'AFP Claude-Agnès Reynaud, immunologiste à l'Inserm.

Les vaccins contre le Covid ont d'ailleurs prouvé leur efficacité sur les formes graves de la maladie en vie réelle. Plusieurs études (1, 2, 3) portant sur des données analysant les campagnes de vaccination, en particulier au Royaume-Uni et en Israël, ont montré que les vaccins anti-Covid présentaient une efficacité contre les formes graves et symptomatiques de la maladie.

En France, une vaste étude dont les résultats ont été publiés le 11 octobre a également montré que la vaccination contre le Covid-19 réduit de 90% le risque d'hospitalisation et de décès chez les plus de 50 ans et semble aussi efficace face au variant Delta, sur lequel on manque toutefois encore de recul.

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Les vaccins autorisés n'ont pas été correctement testés : FAUX

"Pour ma part, je ne me ferai pas vacciner avec quelque chose qui n’a pas été correctement vérifié et testé", poursuit la députée européenne, qui affirme ensuite ne pas vouloir être "réduite à un simple cobaye" en se "faisant vacciner avec un traitement expérimental".

Mais les vaccins contre le Covid-19 autorisés en France ont tous suivi les étapes imposées à chaque traitement avant une mise sur le marché européen et hexagonal: une première phase pour évaluer l'éventuelle nocivité du produit, une deuxième pour le tester sur un nombre limité de malades et une troisième pour juger de l'intérêt thérapeutique auprès d'un échantillon plus étendu.

Les résultats de la phase 3 des essais cliniques, qui se déroule sur des milliers de volontaires ont été communiqués (par exemple ici pour Moderna et ici pour Pfizer en décembre) mais peuvent être mis à jour et complétés ensuite, aux termes de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) conditionnelle accordée à ces vaccins.

Une AMM conditionnelle permet aux développeurs du vaccin de soumettre des données supplémentaires (études nouvelles ou en cours) après le feu vert des autorités, contrairement à une AMM classique où la totalité des données doit être préalablement soumise. Dans le cadre de cette procédure d'urgence, qui a permis d'accélérer considérablement la mise à disposition des vaccins contre le Covid, l'Agence européenne des médicaments (AEM) a accordé des autorisations pour un an, renouvelables.

Mais cela ne veut pas dire pour autant que les vaccins mis sur le marché n'ont pas été testés correctement. "L'AMM conditionnelle rassemble tous les verrous de contrôles d’une autorisation de mise sur le marché standard pour garantir un niveau élevé de sécurité pour les patients", précise l'Agence nationale du médicament (ANSM) sur son site.

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Capture d'écran prise sur le site de l'ANSM le 02/11/2021

L'AEM souligne elle aussi que les vaccins contre le Covid ne peuvent être autorisés en Europe que s'ils "satisfont à toutes les exigences de qualité, de sécurité et d'efficacité définies dans la législation pharmaceutique de l'Union européenne". Une fois toutes les données complémentaires fournies, l'AMM conditionnelle peut être transformée en AMM standard.

Aujourd’hui, les vaccins autorisés font, comme tout nouveau produit médical, l'objet d'une phase de pharmacovigilance pour suivre les effets secondaires des vaccins.

Il n'y a pas de preuve que la balance bénéfice/risque des vaccins est respectée : FAUX

La vaccination "n’a pas montré de preuves scientifiques solides que les bénéfices l'emportent sur la maladie elle-même en termes d'effets secondaires à long terme dont nous ne savons rien à ce jour", explique enfin Christine Anderson.

Mais en délivrant une AMM conditionnelle aux vaccins contre le Covid-19, l'Agence européenne des médicaments (AEM) a estimé que la balance "bénéfice-risque" est respectée, c'est-à-dire que la protection offerte globalement contre le Covid-19 est beaucoup plus importante que les potentiels effets secondaires ou risques induits par le vaccin, comme l'explique l'agence sur son site.

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Capture d'écran prise sur le site de l'Agence européenne des médicaments

La sécurité des vaccins a ensuite continué d'être surveillée de près par l'OMS et par l'Agence européenne des médicaments qui recensent et étudient tout effet indésirable survenu après l'administration d'un vaccin. En France, l'Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM) assure également une surveillance des vaccins contre le Covid-19 et publie des points de santé réguliers.

A ce jour, 593 millions de doses de vaccins ont été administrées dans l'Union européenne à 308 millions de personnes, soit 69% de la population. Si de très rares affections ont été associées à l'AstraZeneca (thromboses), aux vaccins à ARN messager (péricardite, myocardite) ou au Johnson & Johnson/Janssen (syndrome de Guillain-Barré), la plupart des effets secondaires sont bénins (douleurs au point d'injection, fièvre...). Ces effets potentiels restent ainsi extrêmement rares au regard du nombre de doses injectées.

L'Agence Européenne des médicament continue donc de conclure, dans un avis du 9 juillet (en anglais), que "les bénéfices de tous les vaccins Covid-19 autorisés continuent de surpasser leurs risques, étant donné le risque de la maladie du Covid-19, les complications qui lui sont associées, et le fait que des preuves scientifiques montrent qu'ils réduisent les décès et les hospitalisations dues au Covid".

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